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Démêler les composantes neuronales et vasculaires du signal BOLD pour une meilleure visualisation de l'activité cérébrale


​La méthode d’imagerie par résonance magnétique la plus utilisée pour visualiser l’activité cérébrale ne mesure pas directement cette activité mais les changements locaux du débit sanguin (IRMf BOLD), ce qui peut induire des biais dans les interprétations. Des chercheurs de NeuroSpin ont développé une méthode de déconvolution pour estimer à partir des données d’IRMf BOLD le couplage entre activité neuronale et débit sanguin, les signaux caractéristiques de l’activité neuronale et les aires cérébrales associées. Les travaux ont été publiés dans NeuroImage. En collaboration avec une équipe de BioMaps (SHFJ), ils ont appliqué la méthode à des études pharmacologiques.

Publié le 14 septembre 2021

​Avec l’imagerie par résonance magnétique, il est possible de « voir » le cerveau en pleine action. La méthode la plus utilisée est l’IRM fonctionnelle par effet « BOLD » (IRMf BOLD). Mais cette méthode est un détecteur indirect de l’activité neuronale : elle permet d’établir des cartes de variations locales transitoires du débit sanguin et c’est parce que l’activation neuronale s’accompagne d’une augmentation locale de ce débit (on parle de couplage neurovasculaire) que les cartes BOLD reflètent les variations de l’activité neuronale. Le couplage neurovasculaire est habituellement considéré comme un système linéaire invariant dans le temps et il est représenté par une fonction mathématique, la fonction de réponse hémodynamique (FRH). L’un des points critiques est que, de par sa nature, la FRH varie d’une région à l’autre du cerveau, d’un individu à l’autre, d’un état (normal/pathologique) à l’autre, etc. L’estimer à l’échelle individuelle et dans chaque aire cérébrale afin de recouvrer (par une opération mathématique de déconvolution) les activités neuronales locales résolues dans le temps à partir des données d’IRMf BOLD s’avère ardu.

Plusieurs méthodes sont déjà employées pour estimer la FRH pour des expériences d’IRMf où l’on demande aux sujets de réaliser des tâches (IRMf d’activation). Ces méthodes adaptent un modèle pour expliquer le signal BOLD à partir du paradigme expérimental, c’est-à-dire à partir de l’activité cérébrale attendue en fonction de l’expérience dans laquelle est engagé le sujet. L’une des limites est que le paradigme expérimental vient en quelque sorte se substituer à l’activité cérébrale réelle et qu’il ne rend pas compte des possibles différences de délai de réponse entre les sujets. De plus, il n’est pas possible d’utiliser ces méthodes pour estimer l’HRF dans des expériences d’IRMf de repos (sans paradigme expérimental).

Des chercheurs de l’équipe PARIETAL (NeuroSpin), en collaboration avec l’unité BioMaps (SHFJ) et l’Université d’Edimbourg, proposent une méthode de déconvolution qui identifie simultanément le couplage hémodynamique régional, les signaux caractéristiques de l’activité neuronale et les régions cérébrales associées à chacun d’eux. Cette méthode est polyvalente et peut traiter des données d’IRMf de repos ou d’activation, dans un temps très court (1 min par cerveau) grâce à une implémentation optimisée. Elle est accessible en open-source comme module Python (hemolearn : https://github.com/hcherkaoui/hemolearn).

Plusieurs validations ont été conduites. A l’échelle d’un individu, les chercheurs ont su identifier ses principaux réseaux fonctionnels cérébraux de repos et accéder à leur dynamique neurale sous-jacente. A l’échelle d’un groupe (48 individus) issu de la cohorte UK Biobank, cette méthode a permis de quantifier un indice de variabilité hémodynamique inter-hémisphérique afin de discriminer automatiquement des patients ayant subi un accident vasculaire cérébral de sujets sains. De même, ils ont montré sur 459 individus répartis entre seniors (64 à 70 ans) et plus jeunes (40 à 44 ans), qu’un délai hémodynamique allongé est un bon prédicteur (précision de 75 %) du vieillissement cérébral.

Cette méthode a des applications en neuropharmacologie. Elle est actuellement utilisée dans le cadre d’un projet d’imagerie multimodale PET/IRM[1] au SHFJ, Synchropioid (CEA/DRF/Joliot, Claire Leroy & Nicolas Tournier) ayant pour objectifs d’étudier, chez des volontaires sains, l’effet d’une dose analgésique de buprénorphine (médicament opiacé prescrit dans la prise en charge de la douleur) à la fois sur la distribution cérébrale en TEP, grâce à une dose traceuse de 11C -buprénorphine et sur l’activité cérébrale en IRMf pharmacologique. Les analyses préliminaires des données obtenues en IRMf montrent un ralentissement hémodynamique significatif dans les régions cérébrales riches en récepteurs aux opioïdes mu (µ) telles que le cortex cingulaire, l’insula, le striatum et le thalamus. L’analyse conjointe des données de TEP et d’IRMf devrait apporter des éléments mécanistiques cruciaux pour la compréhension des variabilités inter-individuelles des effets des opiacés. 

[1] PET/IRM : Tomographie par émission de positons / Imagerie par résonance magnétique

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