L'élastographie, en échographie, est une méthode qui permet de mesurer l'élasticité (aussi appelée dureté) des tissus biologiques. Elle se base sur la mesure très précise de la vitesse de propagation d'ondes de cisaillement induites dans les tissus en focalisant un faisceau ultrasonore. La vitesse de ces ondes est directement reliée à l'élasticité du tissu dans lequel elles se propagent. La mesure de cette élasticité, ou module de cisaillement, est de plus en plus utilisée pour le diagnostic de différentes pathologies telles que le cancer du sein (une lésion mammaire est bien souvent plus dure que le tissu sain environnant) ou encore la fibrose hépatique (au cours de laquelle le foie devient de plus en plus dur). L'élastographie permet ainsi d'éviter un grand nombre de biopsies dans le foie ou de reclasser des diagnostics de cancers du sein. Cependant, certains cancers ne sont pas très bien caractérisés en élastographie et il est nécessaire d'identifier de nouveaux biomarqueurs pour compléter ces mesures.
Dans cette étude, les auteurs se sont intéressés au module non linéaire de cisaillement qui se traduit par le fait qu'un milieu mou, tels que les tissus biologiques, change de dureté sous l'effet d'une contrainte externe. En comprimant l'organe étudié avec la sonde échographique pendant une mesure d'élastographie, il est possible de suivre ce nouveau biomarqueur et de potentiellement affiner le diagnostic du médecin. Le but du présent travail a été de valider une telle mesure de non linéarité dans une étude collaborative où ont été utilisées l'échographie, l'imagerie par résonance magnétique (IRM) et une méthode de simulation numérique. Il s'agissait plus précisément de valider des résultats obtenus en échographie in vitro sur un fantôme (matériau simulant les tissus biologiques) par deux autres approches, l'une expérimentale, l'élastographie par IRM, et la 2e numérique, une simulation aux différences finies. Pour l'élastographie IRM, ils ont développé une méthode innovante qui leur a permis de mesurer le module non linéaire en imposant une contrainte externe au fantôme placé à l'intérieur de l'imageur. Des résultats confirmés par l'approche numérique, développée en collaboration avec une équipe de l'INSA Lyon, reprenant en détail la théorie de l'acoustoélasticité (prise en compte des variations de rigidité d'un milieu mou sous contrainte uniaxiale). Les trois méthodes ont conduit à une mesure similaire du module non linéaire.
Mesure de l'élasticité (module de cisaillement, à gauche) et mesure de l'élasticité non linéaire (module non linéaire de cisaillement, à droite) sur un fantôme in vitro (morceau de foie dans un bloc d'agar-gélatine, en haut) et dans le sein in vivo en présence d'une tumeur cancéreuse (en bas). Le contraste du module non linéaire est bien meilleur dans les 2 cas et permet une bonne détermination des contours des tissus pour le diagnostic (issu de Bernal et al., In Vivo Quantification of the Nonlinear Shear Modulus in Breast Lesions: Feasibility Study, IEEE-UFFC, 2015).
Ce travail valide la mesure de la non linéarité par des méthodes d'imagerie clinique (échographie et IRM) et ouvre la voie à son utilisation comme nouveau biomarqueur avec un intérêt particulier dans le diagnostic des pathologies cancéreuses du sein.
Contact : Jean-Luc Gennisson (jean-luc.gennisson@universite-paris-saclay.fr)
L'élastographie ultrasonore ultrarapide est une technique qui enregistre la propagation d'ondes de cisaillement générées par des ultrasons focalisés. L'élasticité du tissu est directement reliée à la vitesse de propagation des ondes.