Les chimistes du SCBM fourmillent d'idées pour concevoir de nouvelles méthodes de marquage isotopique, radioactif ou non, toujours plus efficientes, en réduisant le nombre d'étapes nécessaires et en limitant la quantité de déchets, un aspect d'autant plus important lorsque ceux-ci sont radioactifs.
Ils développent des méthodes basées sur l'échange isotopique dynamique qui consiste dans une même réaction à rompre une liaison et à la reformer avec un isotope de l'un des deux atomes engagés dans la liaison, tout en préservant la structure de la molécule.
Alors que leur expertise est largement reconnue pour le remplacement du carbone par l'un de ses isotopes, qu'il soit radioactif (14-C) ou non (13-C), les chercheurs explorent cette fois, dans une étude publiée dans JACS, un système dans lequel il serait possible de faire de l'échange isotopique dynamique entre des isotopes du soufre, atome présent dans de nombreuses molécules biologiques actives.
Leur procédé est basé sur une activation réversible de la liaison C-S catalysée par le nickel. Dans leur système, la liaison C-S activable est portée par une molécule de type aryl-S-alkyl. Avantage de ce transporteur d'isotope du soufre ? On peut également lui incorporer des isotopes de carbone et d'hydrogène ; il constitue donc une sorte de plateforme « multi-échanges » pour réaliser l'échange isotopique au choix, du soufre, du carbone ou de l'hydrogène.
Autre avantage du procédé : il pourrait servir de dispositif de « cryptage isotopique » de composés organiques, utile pour suivre et tracer des marchandises de valeur. Comment ? En combinant trois transporteurs multi-échange, l'un contenant l'isotope 34 du soufre (S-34), un autre un l'isotope C-13 et le dernier le deutérium (D, isotope de l'hydrogène), l'équipe a procédé à l'échange isotopique sur une molécule : elle a obtenu un mélange de la molécule marquée soit au S-34, soit au C-13, soit au D dans des proportions qui dépendent de la combinaison initiale. A l'aide d'une analyse de routine par spectrométrie de masse, les autorités réglementaires pourraient suivre de telles signatures isotopiques et vérifier ainsi l'authenticité de molécules commercialisées.
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