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Reconnaissance automatique des « lignes » du cerveau


​Dans une étude collaborative publiée dans NeuroImage, des chercheurs de NeuroSpin (BAOBAB) proposent d'automatiser la classification et la reconnaissance de motifs de plissements de la surface du cortex susceptibles de présenter des liens avec la survenue de maladies psychiatriques ou de troubles cognitifs en utilisant des algorithmes d'intelligence artificielle. Un chemin vers le décryptage des « lignes » du cerveau.

Publié le 23 août 2021

​La surface du cerveau est divisée en de nombreuses circonvolutions, appelées gyri, délimitées par des plis, appelés sulci. Ces plissements de la surface du cortex sont l'une des caractéristiques les plus frappantes de l'anatomie cérébrale. Leur variabilité est telle que notre « empreinte cérébrale » est unique, comme notre empreinte digitale. En raison de sa grande variabilité, cette caractéristique est encore mal comprise aujourd'hui. Plusieurs études ont montré que des motifs de plissement inhabituels sont souvent liés à des développements anormaux pouvant mener à des syndromes comme l'épilepsie ou la schizophrénie. De plus, un lien étroit a été démontré entre la forme de certains sillons et des spécificités cognitives comme la latéralité manuelle ou un score de lecture. Les motifs de plis semblent donc être des signatures de l'organisation fonctionnelle du cerveau de chaque individu.
Toutefois, l'étude des plis corticaux exige un haut niveau d'expertise que peu de neuroanatomistes possèdent à l'heure actuelle et la classification manuelle des motifs sulcaux locaux est une tâche longue et fastidieuse. En effet, la visualisation 3D des plis aide les experts à identifier les différents motifs mais la variabilité des plis est si élevée que la distinction entre ces motifs nécessite parfois la définition de critères complexes, rendant la classification manuelle difficile et peu fiable. L'automatisation de la reconnaissance des motifs de plissement est essentielle pour permettre d'étendre et de confirmer ces études, tout en utilisant des bases de données plus importantes qui permettraient de mieux comprendre les liens subtils entre les formes sulcales et l'architecture fonctionnelle, notamment lors de l'analyse de profils rares.

Dans cet article, trois algorithmes de classification automatique des motifs de plis ont été utilisés afin de permettre l'extension et la confirmation des études morphologiques sur de telles grandes bases de données : un classificateur SVM (Support Vector Machine), une mesure SNIPE (Scoring by Non-local Image Patch Estimator) et un réseau de neurones à convolution 3D, CNN (Convolutional Neural Networks). Ces méthodes ont été testées sur deux types de motifs pour lesquels il n'existe actuellement aucune approche permettant de les identifier automatiquement : deux patterns du cortex cingulaire antérieur (ACC), aussi représentés l'un que l'autre dans la population générale, et le signe du bouton d'alimentation (PBS) (figure), un motif particulièrement rare ayant un lien avec l'épilepsie issue des régions motrices. Les trois modèles proposés atteignent des précisions équilibrées d'environ 80% pour la classification des motifs ACC et 60% pour la classification du PBS. Le modèle basé sur CNN est plus intéressant pour la classification des schémas ACC grâce à sa rapidité d'exécution. Cependant, les modèles basés sur SVM et SNIPE sont plus efficaces pour gérer les problèmes non équilibrés tels que la reconnaissance de PBS.

Illustration de la variabilité du Power Button Sign (PBS) qui peut être totalement absent, présenter des formes intermédiaires (dans cette étude, ces schémas intermédiaires sont considérés comme des PBS) ou encore être très bien représenté.
Crédits : Borne et al., NeuroImage, Sept 2021


En conclusion, aucun des modèles proposés n'est meilleur que les deux autres car leurs performances en matière d'identification de motifs individuels sont équivalentes et, bien que le modèle le plus rapide soit le modèle basé sur CNN, il est également le moins efficace pour trouver des motifs rares. L'intelligence artificielle a fait des progrès significatifs, notamment dans le domaine de la vision par ordinateur, révolutionnant notre quotidien. Elle nous permettra certainement de déchiffrer un jour les lignes du cerveau.

Contact : Jean-François Mangin jean-francois.mangin@cea.fr

Texte adapté de l'actualité publiée dans le fil ScoopIt SDV Paris-Saclay du 28/06/2021

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