La presse s’est récemment fait l’écho de l’intérêt des communautés scientifique et ostréicole pour le microbiote des huîtres (cf. article The conversation de février 2022). Un lien a été établi entre la bonne santé des huîtres et l’influence de certaines algues sur leur microbiote. Cet exemple, illustre bien l’importance de comprendre comment les microorganismes d’un microbiote fonctionnent et interagissent entre eux et avec leur environnement au cours du temps. Surtout, cette actualité montre que l’intérêt de l’étude des microbiotes dépasse largement le cadre des applications médicales auquel il est souvent cantonné pour le grand public. Les techniques d’analyses des microbiotes sont utilisées pour des applications dans de nombreux secteurs industriels (agro-alimentraire, environnemental…).
Quels sont les moyens d’analyse à disposition ?
La métagénomique est l’approche la plus employée pour étudier les microbiotes. Cependant, connaitre le patrimoine génomique ne fournit pas d'informations fiables sur les traits fonctionnels microbiens qui changent réellement et rapidement en réponse aux stimuli du métabolisme de l'hôte, de l'immunité, de la neurobiologie, du régime alimentaire ou d'autres facteurs environnementaux qui induisent un changement de substrat.
La métaprotéomique offre des perspectives plus larges : en identifiant et en dosant les protéines qui composent un microbiote, elle fournit des « instantanés » de l’état fonctionnel d’un microbiote. Mais alors que la métagénomique est relativement standardisée, les protocoles expérimentaux de protéomique sont encore très divers et en plein développement.
Une structuration de la communauté nécessaire
Sous l’impulsion de leaders européens dans le domaine de la métaprotéomique, comme Jean Armengaud, chercheur au Li2D et responsable de la plateforme ProGénomix (département MTS du CEA-Joliot, Marcoule), la communauté internationale en métaprotéomique a initié en 2021 un réseau afin de fédérer les expertises pour donner une plus-value aux caractérisations fonctionnelles des microbiotes. La « Metaproteomics Initiative »[1] qui regroupe 62 laboratoires, œuvre à :
- rendre accessible les méthodologies les plus avancées en la matière pour l’ensemble des chercheurs explorant les microbiotes ;
- comparer ces méthodologies et affiner leurs limites et champs d’application ;
- les standardiser pour des analyses inter-plateformes de cohortes d’échantillons d’intérêt médical ;
- exploiter ces données en intégrant l’ensemble des outils modernes du microbiologiste ;
- entreprendre des projets de grande ampleur.
Un exemple : comparaison internationale inter-plateformes
La plateforme ProGénoMix du LI2D a d’ailleurs participé au premier exercice international de comparaison de performances en matière d’analyses protéomiques. L’objectif de cette étude comparative, dont les résultats ont été publiés dans Nature Communications[2], était d’évaluer les meilleures pratiques pour les recherches sur les microbiotes, en mettant l’accent sur leur fonctionnement.
L’étude a consisté à comparer les performances des plateformes participant pour l’analyse de deux échantillons tests : un assemblage artificiel de microorganismes et le microbiote directement extrait de fèces humain. Les résultats révèlent une forte variabilité des peptides identifiés et quantifiés lors des mesures. Cette variabilité est due aux différents protocoles de préparation des échantillons et réglages des mesures, et la très grande diversité des peptides présents dans les échantillons entrainant un effet d’échantillonnage. Toutefois, les différences s’estompent lors de l’analyse des données à un niveau supérieur d’interprétation : l’analyse des protéines ou de leurs fonctions gomme cette variabilité. Ainsi la métaprotéomique renvoie une image fiable de la composition microbienne et des profils fonctionnels de chaque échantillon.
Contact Institut Joliot du CEA :