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Résultat scientifique | Photosynthèse | Catalyse bioinspirée

Photosynthèse artificielle, une première : un nano-polymère capable de mimer le photosystème II


​Des chercheurs de l'I2BC (SB2SM), en collaboration avec le CNRS (ICP, ICMMO) ont conçu une approche de photosynthèse artificielle originale, basée sur l'utilisation de nano-polymères semi-conducteurs à base de PolyDiPhenylButadiyne, capables de reproduire la réaction complète de photo-oxydoréduction du Photosystème II des plantes, c'est-à-dire la production d'O2 par photo-oxydation de l'eau et la réduction d'une quinone.

Publié le 7 juillet 2020

Dans la nature, le dioxygène issu de la photosynthèse est utilisé entre autres pour oxyder des substrats organiques et récupérer ainsi l'énergie essentielle aux organismes vivants. Les « photochimistes », qui développent depuis plusieurs années des approches de photosynthèse artificielle empruntant les principes de la photosynthèse naturelle, rivalisent d'imagination pour développer des cellules photo-électrochimiques (PEC) capables de réaliser la photodissociation de l'eau. Le photosystème II (PSII), premier complexe enzymatique intervenant dans les réactions de la photosynthèse dépendantes de la lumière, est une photo-oxydoréductase qui effectue l'oxydation à quatre électrons et à quatre protons de l'eau en dioxygène selon la réaction :
2 H2O + 2 plastoquinone + 4 photons   O2 + 2 plastoquinol (figure). Le PSII stocke ainsi des équivalents réducteurs sous forme de quinones réduites qui seront utilisées pour la synthèse de molécules riches en énergie. Cependant, il est très difficile de reproduire la réaction complète du PSII, qui reste le photocatalyseur d'oxydation de l'eau le plus performant, et une alternative proposée par les chimistes est de découpler dans le temps les processus oxydatifs des processus réducteurs.


Vue schématique du Photosystème II avec la séquence des réactions induites par la lumière (flèches rouges) qui conduisent à la consommation de deux molécules d'eau et la libération d'une molécule de dioxygène. Les quatre électrons et protons récupérés de l'eau sont stockés sur deux molécules de plastoquinone (PQ).  © W. Leibl/CEA


Dans cette étude, les chercheurs ont utilisé des polymères conjugués semi-conducteurs nano-structurés à base de PolyDiPhenylButadiyne (nano-PDPB) en suspension dans l'eau qui, sous irradiation à la lumière visible, conduisent à la formation d'O2 par oxydation photo catalytique de l'eau, et ce, en l'absence d'agents sacrificiels ou de métaux comme co-catalyseurs. De manière intéressante, les chercheurs n'ont pas détecté de production d'hydrogène mais ont observé que les électrons et les protons issus de la photo-oxydation de l'eau étaient stockés sur le semi-conducteur nanostructuré. La récupération de la charge au nano-PDPB, directement ou retardée dans le temps, a été démontrée par la formation de quinone réduite après addition au mélange réactionnel d'un dérivé de quinone, cette dernière agissant comme un réservoir d'hydrogène. En l'absence de quinone comme accepteur d'électrons, du péroxyde d'hydrogène (H2O2) est formé, témoin de la réduction partielle du dioxygène.

Ainsi, les chercheurs ont réussi à reproduire « in vitro » et pour la première fois le fonctionnement du Photosystème II, complexe enzymatique naturel des organismes photosynthétiques. Il est intéressant de noter que la réaction chimique effectuée dans cette étude est efficace même en conditions acides, ce qui devrait faciliter le couplage de ce système à une catalyse de réduction des protons en dihydrogène. Au-delà de ces résultats très prometteurs, les chercheurs font maintenant face à un challenge de taille qui est de comprendre le mécanisme réactionnel de ce matériau photocatalytique nanostructuré qui conduit à la formation de la liaison O=O.

Cet article a été sélectionné par l'équipe éditoriale de Chemical Science comme un « Pick of the Week », c'est-à-dire que le journal promeut une sélection de ses articles favoris en les partageant avec la plus large communauté de chimistes grâce à ses réseaux sociaux, Facebook et Twitter afin de leur donner un haut niveau de visibilité.

Il a également fait l'objet d'une communication de l'institut de chimie du CRNS (INC) parue dans la lettre d'information des instituts du CNRS « En direct des labos » Lire le Fait Marquant du CNRS 

Vue d'artiste © W. Leibl, A. Aukauloo/CEA, CNRS, UPSaclay


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