Lorsqu'elle est forte, l'expression des gènes devient en soi une menace potentielle pour le génome. En effet, elle produit un grand nombre d'ARN messagers qui peuvent former avec l'ADN des hybrides toxiques, appelés R-loops. Ceux-ci perturbent la réplication et entraînent l'apparition de dommages dans l'ADN pouvant conduire à des mutations génétiques.
Comment les machineries cellulaires régulent-elles l'activité des gènes sans mettre en péril l'intégrité du matériel génétique ? C'est à cette question que des chercheurs de l'Institut Ja cques Monod (CNRS-Université Paris-Cité) en collaboration avec le CEA-Jacob ont tenté de répondre.
Ils ont étudié la localisation des gènes formant des structures R-loops, en utilisant des approches pangénomiques et de microscopie sur cellules vivantes, à l'intérieur du noyau de la levure S. cerevisiae.
- Ils ont pu montrer que le simple brin d'ADN présent au sein des R-loops est d'abord détecté par la protéine RPA (replication protein A), un facteur essentiel impliqué dans la réplication et la réparation de l'ADN.
- Le couplage de cette protéine au petit polypeptide SUMO (Small Ubiquitin-like Modifier) permet ensuite d'« étiqueter » les gènes de manière à favoriser leur interaction avec des composants des milliers de pores que compte la membrane d'un noyau cellulaire.
Dans cet environnement, l'élimination des R-loops pourrait être facilitée par l'exportation des ARNm hors du noyau, via les pores nucléaires.
Concilier expression génique élevée et stabilité de l'ADN
Dans des études précédentes, des mécanismes similaires avaient été observés dans des situations où l'ADN de la cellule subit des dommages altérant l'intégrité des gènes : l'ADN défectueux se réorganise alors en vue de sa réparation aux pores nucléaires.
Ces travaux confirment que les gènes, très activement exprimés en réponse à un stress, voient la stabilité de leur ADN préservée grâce à l'élimination des R-loops via les pores nucléaires. Ils apportent un éclairage nouveau sur les mécanismes de détection de ces structures hybrides, ouvrant la voie à la compréhension de leurs rôles dans la biologie des génomes, mais aussi dans les différentes pathologies humaines auxquelles elles sont associées (cancers ou syndromes neurologiques).