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MicroARN : vers une révolution médicale


​​​La découverte des microARN par Victor Ambros et Gary Ruvkun est récompensée par le prix Nobel de médecine 2024. Ce nouveau mécanisme de régulation de l'expression des gènes ouvre un large champ d'investigations notamment pour le diagnostic de pathologies. Des recherches présentées par Nadia Cherradi et Laurent Guyon du CEA/Irig. 

Publié le 16 octobre 2024

​C'est en s'intéressant aux mutations cellulaires dans le ver C.elegans, lors d'expériences indépendantes, que les biologistes américains Victor Ambros et Gary Ruvkun découvrent en 1993 le premier microARN. Baptisé lin-4, il suscite peu l'attention de la communauté jusqu'à ce que l'équipe de Gary Ruvkun en identifie un deuxième en 2000, let-7, présent dans de nombreuses espèces dont l'humain. Une douzaine de laboratoires dans le monde s'emparent alors du sujet et découvre des milliers de microARN chez les eucaryotes. Aujourd'hui, plus de 100 000 publications scientifiques ont vu le jour pour décrypter cette nouvelle classe de molécules dont la fonction révèle un nouveau mécanisme de régulation des gènes. Une découverte qualifiée de « fondamentale pour le développement et le fonctionnement des organismes » par l'Académie royale des sciences de Suède.​​​​ 

Un nouveau mécanisme de régulation des gènes

Les microARN sont des Acides RiboNucléiques, ARN, particulièrement courts dont la fonction diffère de celle des ARN « messagers » : si ces derniers transmettent aux cellules les instructions des gènes pour produire des protéines, les microARN ne codent pas pour des protéines mais diminuent leur quantité par différents mécanismes.  

Les deux lauréats du prix Nobel de médecine 2024 ont en effet montré que les microARN dégradent les ARN messagers en s'hybridant à eux en une structure considérée comme une anomalie par la machine cellulaire et donc éliminée. Les ARN messagers des gènes sont ainsi limités en nombre et, in fine, la quantité de protéines produites. Un seul microARN peut réguler l'expression de nombreux gènes différents et, inversement, un seul gène peut être régulé par plusieurs microARN.

Ce sont ainsi des acteurs majeurs des processus biologiques et pathologiques, la régulation permettant à chaque cellule de sélectionner les instructions pertinentes à son bon fonctionnement. D'où l'espoir suscité pour développer de nouvelles stratégies thérapeutiques, mais dont les premiers essais cliniques ont révélé une toxicité inattendue, notamment des réactions immunitaires, qui reste à comprendre.

De potentiels outils de diagnostic et de pronostic

La recherche sur les microARN est de fait intense depuis les années 2000. Elle a conduit à plusieurs découvertes importantes dont l'observation en 2002 de l'altération de leurs niveaux d'expression cellulaire dans certains cancers humains ou, en 2008, la possibilité de les détecter dans les fluides corporels comme la circulation sanguine. Depuis, les microARN sont identifiés dans les processus de plusieurs pathologies (cancer, diabète, auto-immunité), ouvrant un large champ d'investigation.

Au sein de l'Institut Irig, des chercheurs s'intéressent à leurs modes d'actions dans les cancers à l'échelle des cellules individuelles, à partir d'approches génomiques expérimentales et du développement d'outils bio-informatiques. D'autres étudient particulièrement l'implication des microARN dans l'agressivité du cancer de la glande surrénale ainsi que leur impact sur l'évolution de la tumeur lorsqu'ils sont transférés d'une cellule à l'autre. Avec l'institut Jacob et ses outils de séquençage, ils évaluent également le potentiel d'utilisation des microARN comme biomarqueurs de diagnostic et de pronostic de ce cancer de la glande corticosurrénale, via la détection de leurs signatures circulantes.


Par Nadia Cherradi, Directrice de recherche et Cheffe de laboratoire et Laurent Guyon, Directeur de recherche spécialiste data science à l'Irig 

 

 



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