Jusqu'à cent milliards de tonnes par an, voici la quantité de CO2 que l'écosystème océanique fixe chaque année, via la photosynthèse. Les algues sont un acteur important de ce puits de carbone et les biologistes cherchent à décrypter leurs mécanismes moléculaires, comme dans cette étude internationale du Biam et de la Carnegie Institution for Science (Stanford, États-Unis).
Pour rappel, la photosynthèse est une série de processus bioénergétiques complexes produisant de la biomasse à partir d'énergie solaire, de CO2, d'eau et de nutriments. La conversion de l'énergie solaire permet la photolyse de l'eau et induit une circulation d'électrons dans les membranes biologiques. Cette circulation s'accompagne d'une force motrice de protons utilisée pour produire de l'ATP, l'un des deux vecteurs énergétiques des réactions métaboliques de fixation du CO2.
Quand des voies de transfert sous-estimées apparaissent indispensables
Plusieurs voies de transfert de ces électrons ont été identifiées au cours des dernières décennies. Jusqu'à présent, celle baptisée « schéma en Z » était considérée comme la voie royale pour produire de l'ATP, alors que le rôle des autres voies dites alternatives était largement sous-estimé. « Quitte à sous-estimer ces voies alternatives, nous avons décidé de toutes les désactiver chez l'algue verte Chlamydomonas, modèle d'étude que nous maîtrisons bien », expose Gilles Peltier, Directeur de recherche au Biam.
Forts de leurs expertises en ingénierie génétique et moléculaire, les chercheurs sont ainsi parvenus à un premier résultat : lorsqu'il est seul, le schéma en Z ne parvient pas à produire de l'ATP en quantité suffisante pour que la cellule fixe le CO2.
Une grande flexibilité pour assurer la production d'énergie nécessaire à la fixation de CO2
Leurs travaux ont également consisté à désactiver individuellement les trois voies alternatives : l'une « cyclique » ; l'autre « pseudo-cyclique » ; et une dernière, moins connue, impliquant un transfert d'électrons entre les chloroplastes et les mitochondries. En coupant une, puis deux voies des trois, par mutation génétique ou en utilisant des inhibiteurs spécifiques, les chercheurs ont observé que la fixation du CO2 n'était que peu affectée.
« Les voies alternatives peuvent donc se substituer les unes aux autres avec une étonnante flexibilité. Et, contre toute attente, c'est la voie faisant intervenir la coopération des chloroplastes et des mitochondries qui s'avère la plus efficace pour séquestrer efficacement le CO2 », commente le spécialiste.
Les travaux se poursuivent pour déterminer les caractéristiques propres à chacune de ces voies ; caractéristiques qui pourraient rendre chacune de ces voies plus ou moins efficace selon les conditions environnementales auxquelles les algues sont soumises.