Le favipiravir est actif in vitro et sur des modèles rongeurs contre plusieurs virus à ARN. Il est d'ores et déjà autorisé au Japon pour le traitement d'infections grippales bénignes. Son efficacité a été établie sur des modèles animaux primates contre les virus à ARN Ebola, Lassa et Marburg, tous trois responsables de maladies hémorragiques, ce qui fait de lui un candidat potentiel contre les virus à ARN de maladies émergentes, telle que la Covid-19. Le favipiravir est actuellement en cours d'évaluation dans plus de 72 essais cliniques dans le monde chez des patients Covid-19 ambulatoires et hospitalisés. Par ailleurs, lors de l'épidémie de virus Zika aux Antilles et en Guyane en 2016, sa forte activité contre ce virus avait été révélée in vitro. Néanmoins, aucune évaluation clinique n'avait été entreprise en raison du déclin rapide de l'épidémie.
Afin de soutenir les évaluations cliniques actuelles et futures du favipiravir contre les infections à SARS-CoV-2 et à Zika, et plus généralement contre de futurs virus à ARN émergents, une équipe du CEA-Jacob a procédé à une évaluation préclinique de l'activité du favipiravir en préventif contre les virus Zika et Sars-Cov-2 sur des modèles animaux primates.
Le favipiravir a été administré à des modèles animaux primates trois jours avant l'infection par le virus Zika (prophylaxie pré-exposition). Sept jours après l'infection, les animaux traités présentaient des niveaux de charge virale inférieurs à ceux des animaux non traités, montrant que le favipiravir a eu un effet significatif sur la réplication virale de Zika. Ce résultat sur l'animal démontre pour la première fois l'activité antivirale in vivo du favipiravir. Bien que la tératogénicité probable du favipiravir empêche son utilisation chez les femmes enceintes, sa facilité de stockage et son administration orale le rendent particulièrement pertinent comme première ligne de protection à administrer aux cas suspects ou contacts au virus Zika.
En revanche, dans les mêmes conditions d'administration, le favipiravir n'a pas eu d'effets bénéfiques contre la charge virale chez les animaux infectés par le SARS-Cov-2, celle-ci étant restée similaire chez les animaux traités ou non avec l'antiviral. Une tendance à l'augmentation de la charge virale a même été observée chez certains des animaux traités, dès trois jours après l'infection, associée à une exacerbation de la Covid-19 : ceux-ci présentaient un syndrome de dysfonctionnement de plusieurs organes avec une insuffisance hépatique, cardiaque et rénale aigue. Ces effets n'ont pas été observés chez des animaux non infectés par le SARS-Cov-2 et traités avec le favipiravir, ni chez les animaux infectés et traités par un placebo : ils seraient ainsi liés à la combinaison de l'administration du favipiravir et de l'infection par le SARS-CoV-2. Or des patients du COVID-19 traités avec cet antiviral dans le cadre d'essais cliniques ont principalement manifesté des effets indésirables concernant les fonctions hépatiques.
Les résultats de cette étude incitent à une évaluation clinique du favipiravir contre le virus Zika mais remettent en question son utilisation chez l'Homme pour traiter l'infection par le SARS-CoV-2.
Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec l'Inserm, l'Institut Pasteur, l'Université d'Aix-Marseille, l'Université de Lyon 1 et l'Université de Bordeaux.
A fait l'objet d'un communiqué de presse.