Dans le but d’améliorer l’analyse des coupes histologiques numérisées à l’échelle microscopique, une équipe CEA/CNRS de MIRCen (Molecular Imaging Research Center) propose une approche originale combinant reconstruction histologique 3D de cerveaux de souris et analyses statistiques de groupes. Cette méthode a été testée avec succès pour localiser automatiquement et avec une grande précision des variations de la charge amyloïde impliquée dans la maladie d’Alzheimer. Cette étude a été réalisée en collaboration avec une unité INSERM de l’Institut Pasteur de Lille et a donné lieu à une publication dans le journal
Frontiers in Neuroscience (2018).
Pour valider leur approche, les chercheurs ont utilisé des souris atteintes de la maladie d’Alzheimer dont certaines surexprimant le gène ADAM30. En effet,
dans une première étude1, ils ont montré chez ces dernières une baisse significative des plaques amyloïdes au niveau de l’hippocampe en utilisant un atlas numérique de cerveau de souris à l’échelle des principales régions anatomiques. Avec l’approche alliant reconstruction histologique 3D et analyses statistiques de groupes, les chercheurs ont pu détecter, automatiquement et à une échelle beaucoup plus fine, des variations de la charge amyloïde au niveau de sous régions anatomiques. Ils ont ainsi confirmé les premiers résultats obtenus et ont identifié une zone supplémentaire au niveau du cortex présentant une baisse significative de la charge amyloïde.
Comme dans la première étude, les chercheurs commencent par une reconstruction 3D des cerveaux de souris de l’étude (celles atteintes de la maladie d’Alzheimer (les témoins) et celles atteintes de la maladie et surexprimant le gène ADAM30) à partir de séries de coupes histologiques. Puis ils créent un modèle moyen de ces cerveaux en les superposant numériquement. L’étape suivante a consisté à repositionner sur ce référentiel spatial commun la cartographie quantitative des charges amyloïdes de chacun des cerveaux reconstruits en 3D. Les chercheurs ont pu alors produire automatiquement une cartographie détaillée des zones de variations de la charge amyloïde en réalisant des tests statistiques à l’échelle du cerveau entier, augmentant ainsi le périmètre d’exploitation des coupes histologiques cérébrales.
L’identification précise des zones de variation de la charge amyloïde a permis également de caractériser plus finement les propriétés des plaques amyloïdes (nombre, taille), et ainsi de mieux comprendre la localisation et la séquence des mécanismes d’actions étudiés (évolution et propagation de la charge amyloïde dans le cerveau).
Cette nouvelle approche générique pourrait être étendue à l’étude de phénomènes cellulaires complexes tels que la mort neuronale et la neuroinflammation à l’échelle de cerveaux entiers. Elle requiert cependant des ressources informatiques très importantes en termes de capacité de stockage (plusieurs téraoctets par cerveau) et de calcul (plusieurs milliers d’heures de calcul par cerveau). Des travaux sont en cours au sein du laboratoire pour adapter et transférer ces développements originaux sur des supercalculateurs du CEA au Très Grand Centre de Calcul de Bruyères-le-Châtel.
ADAM30 Downregulates APP-Linked Defects Through Cathepsin D Activation in Alzheimer's Disease, Letronne et al., EBiomedicine, 2016