Le rejet chronique, dont la forme la plus courante est le syndrome de bronchiolite oblitérante (SBO), est la principale cause de mortalité à long terme après une transplantation pulmonaire. Une étude exploratoire menée par le Service de Recherches en Hémato-immunologie (SRHI) en collaboration avec le Service de Transplantation Pulmonaire de l'hôpital Foch (Pr Olivier Brugière) s'est intéressée au potentiel de la molécule de tolérance immunitaire HLA-G liée aux vésicules extracellulaires circulantes comme biomarqueur non invasif pour prédire le rejet chronique après une transplantation pulmonaire.
Les chercheurs ont analysé les niveaux plasmatiques de HLA-G lié aux vésicules extracellulaires (HLA-GEV) chez 78 patients, issus de la cohorte nationale multicentrique COLT, ayant bénéficié d'une transplantation pulmonaire et en état stable pendant la première année suivant la transplantation. Parmi ces patients, 37 ont développé un dysfonctionnement chronique du greffon pulmonaire dans les 3 ans suivant la transplantation.
Les résultats de l'étude ont montré que les patients ayant des niveaux plasmatiques faibles de HLA-GEV à 12 mois post-transplantation présentaient un risque significativement plus élevé de développer un dysfonctionnement chronique du greffon pulmonaire (SBO ou syndrome restrictif du greffon) et une survie du greffon réduite à 3 ans.
L'analyse multivariée a confirmé que les faibles niveaux de HLA-GEV étaient un facteur prédictif indépendant du développement du dysfonctionnement chronique du greffon pulmonaire, même après ajustement pour d'autres facteurs de risque potentiels tels que les anticorps anti-donneur, la maladie initiale, l'urgence de la transplantation et le type de traitement d'induction.
L'intérêt de cette étude réside dans le fait que le dosage de HLA-GEV est une méthode non invasive et facilement réalisable. Si ces résultats sont confirmés par des études ultérieures sur de plus grandes cohortes de patients, la mesure de HLA-GEV pourrait permettre une intervention plus précoce pour prévenir le rejet chronique et améliorer la survie du greffon après une transplantation pulmonaire.
Les vésicules extracellulaires sont des particules libérées par les cellules qui peuvent transporter des protéines, des lipides et des acides nucléiques et jouer un rôle critique dans la communication intercellulaire. L'hypothèse des auteurs est que la forme HLA-GEV proviendrait des cellules bronchiques du greffon, où ces mêmes auteurs ont montré dans de précédentes publications une expression de HLA-G in situ chez les patients en état stable. De plus, HLA-GEV pourrait jouer un rôle actif dans la tolérance du greffon en inhibant la maturation des cellules dendritiques et la réponse allogénique des lymphocytes T. Des recherches sont en cours pour valider ces résultats et explorer les mécanismes par lesquels HLA-GEV contribue à la tolérance du greffon pulmonaire. Il serait également intéressant d'évaluer le potentiel thérapeutique de HLA-GEV, par exemple en utilisant des vésicules extracellulaires modifiées pour augmenter leur expression de HLA-G.
Un brevet a été déposé sur la base de ces résultats montrant que le dosage sanguin de HLA-GEV constituerait un test sanguin simple et non invasif permettant aux médecins de détecter plus tôt les patients à risque de rejet et d'adapter leur traitement en conséquence.