Ces résultats constituent une première mondiale avec cette
technologie. Ils ouvrent des perspectives dans de nombreux domaines de
la chimie mais également de la biologie avec la découverte de
combinaisons chimiques utiles pour la recherche fondamentale et pour le
développement d’applications, notamment en imagerie ou en
nano-biotechnologies.
Ces résultats viennent d’être publiés en ligne par la revue Angewandte Chemie International Edition.
En
chimie organique, l’identification de nouvelles réactions chimiques,
thématique de recherche fondamentale majeure, permet d’envisager la
construction de nouvelles molécules pour diverses applications. Afin de
les mettre en évidence, les chercheurs utilisent classiquement une
approche rationnelle qui consiste à mélanger des molécules conçues pour
réagir ensemble et former un nouveau produit. Cependant, la part
qu’occupe le hasard dans le processus de découverte n’est pas à
négliger, l’histoire de la chimie étant riche de découvertes purement
fortuites (découverte du Nylon, de la pénicilline, du Téflon, de
colorants, etc.).
Partant du constat simple que la probabilité de découverte augmente avec le nombre d’expériences réalisées, des
chercheurs du CEA ont mis au point une nouvelle approche basée sur la
miniaturisation des expériences et sur l’utilisation d’une nouvelle
technique de criblage rapide à haut débit, capable d’identifier parmi
des milliers de combinaisons chimiques celles générant des produits
d’intérêt. Le procédé développé consiste à réaliser les
expériences chimiques avec de très faibles quantités de réactifs sur une
plaque de 96 puits, puis à analyser les milieux réactionnels grâce à un
test rapide utilisant des anticorps spécifiques capables de détecter
tout produit de couplage. Les chercheurs ont ainsi réalisé le criblage,
ou sélection, de milliers de réactions chimiques, mettant chacune en
jeux deux fonctions chimiques, en présence d’un métal, tel que le
cuivre, le palladium ou l’or, pouvant jouer le rôle de catalyseur[3]. La
miniaturisation leur a permis de travailler sur de très petits volumes,
de l’ordre du microlitre, et d’augmenter le haut débit du criblage,
effectuant ainsi jusqu’à 1000 expériences par jour. Cette nouvelle
démarche est basée sur le principe de « hasard forcé » (« forced serendipity » en anglais), ou encore un speed-dating
forcené qui favorise la découverte de nouvelles réactions chimiques. Ce
travail démontre qu’il est possible d’accélérer le processus de
découverte en combinant conception, miniaturisation des expérimentations
et criblage haut débit.
Principe
de découverte de nouvelles réactions chimiques par criblage
systématique d’un grand nombre d’expériences. © F. Taran CEA
[1] iBiTecS, Service de Chimie Bioorganique et de Marquage (SCBM) et
Service de Pharmacologie et d’Immunoanalyse (SPI) et IRAMIS, Service
Interdisciplinaire sur les Systèmes Moléculaires et les Matériaux
(SIS2M).
[2] Criblage haut-débit : technique permettant d’identifier parmi une
série d’expériences celle(s) ayant un résultat intéressant.
[3] Composé chimique permettant d’accélérer une réaction chimique.
Ainsi, grâce à leur nouvelle approche, les chercheurs
du CEA ont découvert deux réactions chimiques inédites : une réaction de
désulfurisation et une réaction de cyclisation impliquant toutes les
deux le cuivre comme métal catalyseur. Ces résultats
constituent une première mondiale avec cette technologie. Ils
correspondent à la première phase d’un vaste programme de recherche
consacré à l’identification de nouvelles réactions chimiques. L’objectif
est notamment la mise en évidence de réactions accessibles et utiles
aux biologistes, aussi bien pour la recherche fondamentale que pour le
développement de nouveaux outils chimiques dont les applications vont de
l’imagerie aux nano-biotechnologies.
Note : ces travaux ont
bénéficié du soutien financier de la Communauté Européenne (Projet
BioChemLig) et de l’ANR (projet ClickScreen).