sPHENIX a pour objectif premier d'analyser le plasma quark-gluon créé dans le collisionneur d'ions lourds relativistes (RHIC) du Brookhaven National Laboratory (Etats-Unis). Il vise à déterminer ses caractéristiques et comment sa nature fortement couplée émerge des interactions sous-jacentes de ses constituants : les quarks et les gluons.
L'instrument de mesure principal de cette expérience est une chambre à projection temporelle (TPC), contenant un volume de gaz qui réagit au passage des particules chargées et permettant de reconstruire leurs trajectoires grâce aux traces qu'elles y déposent.
Une des difficultés majeures pour ce type de trajectographe est de maintenir une bonne homogénéité du champ électrique sur l'ensemble du volume de détection pour garantir une bonne résolution de reconstruction. Cependant le nombre important de particules créées lors des collisions entraîne une augmentation importante de la charge d'espace à l'intérieur de la chambre, ce qui provoque fatalement des distorsions du champ électrique et donc une baisse de la qualité des données.
Pour remédier à ce problème, le CEA-Irfu a proposé de développer un trajectographe additionnel, appelé TPOT (TPc Outer Tracker), qui a été intégré à la structure du détecteur sPHENIX autour de la TPC afin d'optimiser son étalonnage. La technique utilisée par TPOT consiste à fournir des points de mesures supplémentaires après que les particules aient traversé la chambre afin de procéder à une reconstruction précise de leurs trajectoires.
interne composé des détecteurs INTT (cercles jaunes) et
MVTX (verts)
et un des huit modules du détecteur TPOT.
Développement d'un détecteur fiable et compact en un temps record
En plus des difficultés liées au développement, l'intégration de TPOT dans le dispositif expérimental sPHENIX a soulevé de nombreuses contraintes, avec en premier lieu la question des délais. En effet, les expériences menées actuellement sont les dernières qui serviront à collecter des données sur des collisions au RHIC avant sa transformation en collisionneur électron-ion (EIC) dont les faisceaux circuleront à partir de 2030. Il était donc important de répondre vite aux besoins de la TPC. Outre les délais, le détecteur devait aussi être peu volumineux afin de s'adapter à l'espace disponible et particulièrement fiable car d'aucune accessibilité une fois l'expérience entièrement assemblée.
Ce résultat a été rendu possible grâce à l'expertise du Département d'Electronique, des Détecteurs et d'Informatique pour la Physique (DEDIP) qui a permis à l'Irfu de développer complètement TPOT en interne en moins de deux ans, de la conception du modèle en novembre 2021 à son intégration à l'expérience en août 2023.
Les performances de TPOT dans le système sont actuellement en cours d'analyse mais les résultats ne seront définitifs qu'une fois les données des autres détecteurs récupérées. Cette collaboration offre aussi une occasion aux physiciens de l'Irfu d'être impliqués dans les prises de données et analyses de sPHENIX durant les prochaines années. La première phase d'acquisition des données s'est déroulée en 2024 avec des collisions proton-proton à 200GeV et sera complétée par des analyses sur des collisions sur faisceaux d'or (Au+Au) à la même énergie en 2025.