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Découverte d’une nouvelle morphogenèse dans les cellules


​​C'est en étudiant in vitro l'organisation interne des cellules que des chercheurs du CEA et du Collège de France ont découvert un nouveau mécanisme de morphogenèse. Impliquée dans l'apparition de formes dans des systèmes homogènes, elle se traduit ici par l'auto-organisation des microtubules et des moteurs moléculaires en des motifs réguliers sur de longues distances. Cette découverte interroge les modèles actuels des mécanismes par lesquels les cellules définissent leurs axes d'orientation. 

Publié le 5 décembre 2024

L'organisation interne des cellules est largement déterminée par l'architecture du réseau de microtubules, ces filaments essentiels aux transports intracellulaires. Si les chercheurs savent que les microtubules orientent les moteurs moléculaires vers leurs extrémités positives ou négatives, ils ignorent si ces moteurs agissent en retour sur la disposition et la polarité du réseau. C'est en étudiant in vitro ce processus que des chercheurs du CEA-Irig et du Collège de France ont découvert un nouveau mécanisme de morphogenèse qui permet de faire émerger de l'ordre dans un mélange aléatoire.

Révélée par la chimie et la physique, la morphogenèse est un ensemble de mécanismes induisant l'apparition de formes spectaculaires dans des systèmes homogènes. « Elles ont notamment rendu célèbres les réactions de Belousov-Zhabotinski et les structures de Turing. Dans le premier cas, le couplage de produits avec des réactifs génère des ondes régulières qui se propagent sur de longues distance ; dans le second, l'amplification locale de la réaction couplée à son inhibition à longue portée produit des motifs réguliers », expliquent Manuel Théry et Laurent Blanchoin de l'équipe Cytomorpho qui ont mis à jour un nouveau processus actif capable d'aligner les microtubules et de trier les moteurs moléculaires en un réseau périodique de bandes et de taches capable de s'auto-organiser régulièrement sur de grandes distances.

Il en résulte que les moteurs moléculaires ont bien une incidence dans l'organisation des microtubules. Non seulement ils les déplacent, ils les alignent aussi en formant des barrières, tout en se séparant en domaines distincts. Les microtubules et les moteurs s'influencent donc mutuellement, créant une structure ordonnée et en constante évolution pouvant apparaître ou disparaître selon les forces en jeu.

Des motifs évoluant en fonction de la concentration en moteurs moléculaires

Pour connaître les conditions précises d'apparition de ces motifs réguliers, une approche théorique a mis en équation l'équilibre nécessaire entre le transport et la diffusion des moteurs moléculaires. Elle révèle qu'un déséquilibre dans la concentration des moteurs, et donc dans les forces exercées sur les microtubules, empêche la formation des motifs, provoquant un mouvement constant des microtubules. « Nous avons également identifié les conditions exactes où une légère variation de la concentration des moteurs fait passer le système expérimental d'un mouvement permanent des microtubules à leur immobilisation soudaine, entraînant l'apparition de domaines alternés », indique Jean-François Joanny du Collège de France.

Contrairement aux taches de Turing issues des couplages de réactions chimiques qui s'opposent dans l'espace, les taches des moteurs moléculaires sont générées par l'activité en périphérie où les microtubules séparent les moteurs à l'interface et forment des motifs.

Superposition d'images de microscopie TIRF (imagerie par ondes évanescentes) permettant de visualiser les microtubules (jaune) et deux moteurs moléculaires (magenta et cyan).


Bien qu'aucune donnée expérimentale ne confirme ce processus morphogénétique, quelques indices sont révélateurs. Par exemple, le fait que les microtubules s'alignent souvent dans les cellules avec des polarités orientées dans la même direction ; ou que les moteurs de même polarité tendent à former des domaines plus concentrés en accord avec leur direction de déplacement. Cette hypothèse pourrait remettre en question les modèles actuels des mécanismes par lesquels les cellules définissent leurs axes d'orientation.

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