Les bactéries et les virus sont essentiels à la vie sur Terre. Depuis près de 4 milliards d'années, les bactéries ont co-évolué pour faire face aux menaces incessantes des virus qui sont les entités les plus abondantes sur Terre, leur nombre étant estimé à un trillion pour chaque grain de sable sur la planète. Pour repousser leurs attaques, les bactéries ont développé tout un ensemble de mécanismes de défense (quelques centaines connus à ce jour), appelé défensome. Ces systèmes immunitaires bactériens sont au cœur d'une analyse à grande échelle conduite par des chercheurs du CEA-Jacob.
Cette étude, visant à évaluer l'abondance et la diversité de centaines de mécanismes de défense, est une première de par son ampleur : 7759 défensomes de bactéries de plusieurs environnements (sols, océans, intestin humain), de plusieurs pays, ont en effet été analysés pendant deux ans. « Nous avons eu la chance de partir d'un vaste ensemble de données, notamment les génomes de bactéries océaniques séquencés au Genoscope dans le cadre du projet Tara », indique Pedro Oliveira.
Des découvertes pertinentes sur le plan clinique
Les chercheurs ont découvert que les bactéries s'adaptent constamment et, surtout, qu'elles choisissent des stratégies de défense en fonction de l'environnement dans lequel elles évoluent. « Il existe des mécanismes similaires selon les environnements mais d'autres sont privilégiés par les bactéries, du simple fait que certains types de virus peuvent différer d'un environnement à l'autre », résume Angelina Beavogui. Leurs résultats montrent également que le système défensif des bactéries océaniques est le moins diversifié, probablement parce que l'environnement aquatique est moins structuré.
L'identification de tous ces systèmes de défense présente des intérêts d'un point de vue clinique. En effet, en connaissant précisément l'arsenal de défense d'une certaine espèce bactérienne, il est plus facile de concevoir des thérapies capables de le cibler. « Nous pouvons envisager d'exploiter des faiblesses immunitaires pour, par exemple, tuer certaines bactéries résistantes aux antibiotiques, en ciblant leurs propres mécanismes de défense », illustrent les biologistes.