Le phénomène El Niño de 2015-2016 a entraîné de graves sécheresses et des températures record dans les tropiques. Comment les forêts sont-elles affectées par ces épisodes ? Récupèrent-elles ensuite ?
Pour le savoir, des chercheurs du LSCE (CEA-CNRS-UVSQ) et leurs partenaires ont mesuré la biomasse aérienne (des arbres) pendant et après la sécheresse associée à cet El Niño, jusqu'en 2019, grâce à des observations satellitaires (émission dans le domaine microondes). Ils ont de plus enregistré la répartition de la biomasse entre les parties inférieure et supérieure de la canopée, c'est-à-dire la structure des couverts végétaux.
Ils constatent que la sécheresse provoque une diminution de la biomasse aérienne, d'autant plus importante que la sécheresse est longue et sévère et que le sol est riche en argile. La récupération est influencée, quant à elle, par les pertes de biomasse aérienne lors de sécheresses antérieures et par la structure de la canopée.
- 60 % des forêts exposées à la sécheresse de 2015-2016 ont vu leur biomasse aérienne diminuer rapidement, à l'exception de la partie la plus humide de l'Amazonie, où la biomasse n'a diminué qu'un an plus tard.
- Fin 2019, seuls 40 % des forêts ayant subi une réduction de leur biomasse aérienne l'avaient complètement récupérée.
Les observations de pertes de biomasse aérienne ne sont reproduites que par des modèles utilisant des déficits hydriques et des teneurs en argile du sol régionaux.
La récupération de la biomasse est, quant à elle, sensible non seulement à l'ampleur des pertes, mais également à la structure de la canopée, représentée par le rapport entre canopées inférieure et supérieure – un rapport γ élevé indiquant une canopée épaisse et fermée. De telles forêts (γ ≥ 0,3) semblent avoir une plus forte capacité de récupération que les forêts à faible γ.
Ce paramètre devrait dorénavant être mieux pris en compte lors de l'anticipation des impacts de sécheresses dans les tropiques.