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Révélation sur les phages, alternatives aux antibiotiques


​Le phage est un redoutable tueur de bactéries. Des chercheurs de l’IBS ont montré comment communiquent sa queue, qui reconnaît sa cible, et sa capside, qui renferme de quoi détruire la bactérie. 

Publié le 15 décembre 2017
Les bactéries peuvent être attaquées par des virus : les bactériophages. La grande majorité des phages est formée d’une capside, renfermant le matériel génétique, et d’une queue, reconnaissant l’hôte. Lorsque la queue du phage reconnaît la bactérie, la capside s’ouvre et libère l’ADN viral qui transite à l’intérieur du tube de la queue pour être ensuite injecté dans sa cible. Mais comment la queue et la capside communiquent-elles ? En combinant cryo-microscopie électronique et cristallographie, des chercheurs de l’IBS ont répondu à cette question grâce à la détermination de la structure du tube de la queue.

Les scientifiques se sont intéressés aux mécanismes moléculaires qui permettent aux phages d’injecter leur matériel génétique dans le cytoplasme de la bactérie après reconnaissance spécifique de leur hôte, en travaillant sur le phage T5 qui possède une longue queue flexible et non contractile, qui attaque la bactérie Escherichia coli. Ils ont dans un premier temps déterminé par cristallographie aux rayons X la structure atomique à 2,2 Å de résolution de la protéine majeure de queue, pb6. Ces travaux montrent qu’il y a une homologie structurale entre les protéines des queues des phages et les seringues moléculaires des bactéries. Elles ont donc une origine commune.

Ils ont ensuite déterminé la structure du tube de la queue du phage à 6 Å de résolution, avant et après reconnaissance de l’hôte, par cryomicroscopie électronique. Ils ont pu montrer que, contrairement au mécanisme jusqu’alors proposé, l’information de reconnaissance de l’hôte n’est pas transmise jusqu’à la capside par les parois du tube de la queue ! En effet, les deux structures sont identiques, à la résolution d’étude. Les chercheurs proposent que cette fonction est assurée par la protéine pb2 qui, insérée à l’intérieur du tube, sert d’échafaudage à la polymérisation de la protéine majeure de queue et en détermine ainsi la longueur. Cette protéine serait repliée dans un état métastable au sein de la queue : l’interaction avec l’hôte induirait des modifications de la structure de l’extrémité de la queue, déstabilisant la protéine vernier qui serait alors expulsée. Ceci constituerait le signal permettant à la capside de s’ouvrir et de libérer l’ADN viral. Aux vues de la grande conservation de structure des protéines majeures de queues, les auteurs proposent que ce mécanisme soit commun à tous les phages à longue queue, qui ne représentent pas moins de 86% des phages.

Des phages pour relayer les antibiotiques ?

Pourquoi ne pas utiliser les phages pour lutter contre les infections bactériennes ? Spécifiques, autoréplicatifs, ils sont l’ennemi naturels des bactéries. L’idée n’est pas nouvelle. En France, la phagothérapie naît en 1919 à l’hôpital Necker pour traiter des enfants victimes de dysenterie bacillaire. Cette méthode fait aussi ses preuves pour traiter des cas de peste en Egypte en 1925 et une épidémie de choléra en Inde en 1926 [1]. Ces succès ont un retentissement tel qu’ils engendrent une mondialisation de la phagothérapie. Tout s’arrête suite à deux évènements successifs : la découverte de la pénicilline par Alexander Fleming en 1928 puis la seconde guerre mondiale, qui a généré des besoins immenses en traitements anti-infectieux. Les antibiotiques semblent a priori plus faciles à fabriquer, plus stables et plus simples d’emploi. Si la phagothérapie a ainsi disparu en Occident (excepté dans les pays de l’ex-Europe de l’Est), elle est en train de trouver un nouveau souffle suite au développement de bactéries résistantes aux antibiotiques. D’où l’importance de relancer les travaux de recherche sur les phages.

[1] Annals of Burns and Fire Disasters - vol. XXVIII - n. 1 - March 2015

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