Les cryomécanismes Icar (Indexed Cryogenic Actuator for Rotation) destinés à Metis (Mid-infrared ELT Imager and Spectrograph) sont issus d'une lignée de développements de l'Irfu pour l'astronomie infrarouge et submillimétrique :
- Visir (VLT Imager and Spectrometer for mid Indra Red) pour le Very Large Telescope (Chili) en 2004,
- Miri (Mid-infrared Instrument) pour le James Webb Space Telescope en 2010,
- Camistic (Caméra infrarouge submillimétrique pour l'Antarctique) en 2012,
- Euclid en 2017.
L'idée de départ du mécanisme d'Icar est l'association improbable d'un moteur pas à pas utilisé pour du positionnement de précision et un embrayage à denture extrait d'une machine tournante industrielle. Le premier fait tourner une roue supportant des composants optiques et le second bloque la roue en position. Restait à adapter le dispositif pour qu'il fonctionne de 20°C à -260°C.
La première réalisation de cryomécanisme a permis de faire tourner, degré par degré, les roues supportant des optiques de Visir, avec une répétabilité de ± 50 microradians. Leur tenue aux vibrations en vue d'un lancement de fusée a ensuite été améliorée pour Miri tandis que le modèle pour Camistic a été rendu plus compact, avec 200 positions par tour au lieu de 360. Pour Euclid, l'architecture mécanique a été revue en profondeur en collaboration avec un industriel (DMP AERO) pour satisfaire le cahier des charges d'une mission spatiale.
Pour Metis qui équipera un télescope au sol, les équipes de l'Irfu ont dû réviser tous les choix techniques afin de réduire d'un facteur 2,5 le coût du cryomécanisme sans dégrader ses performances. Ainsi par exemple, la fourniture par SAFRAN-ED du moteur pas à pas certifié pour l'espace n'a pas été remise en cause mais l'équipe a approvisionné des jeux de dentures, non plus auprès d'entreprises de mécanique de haute précision, mais chez des industriels des engrenages dont les produits, moins onéreux, se sont révélés compatibles avec les performances de positionnement recherchées.
Pour valider la nouvelle conception du mécanisme Icar, un prototype a été construit en 2019 puis testé avec succès jusqu'à -220°C. Ses performances dépassent en effet celles des générations précédentes, avec une répétabilité de positionnement angulaire de ± 15 microradians.
Cependant un problème de frottement est rapidement apparu aux basses températures. Une longue enquête a finalement permis d'identifier les causes, parmi lesquelles un couplage entre les billes du roulement et le champ magnétique environnant. La solution : remplacer les billes en inox par des billes en céramique. Il a fallu également changer le matériau des cages renfermant les billes : substituer au laiton une matière plus « glissante », compatible avec le vide et la cryogénie.
Les essais ont repris au dernier trimestre 2020 avec un test de durée de vie effectué sur 165.000 mouvements, correspondant à 18 ans d'observations sur Metis.
Après la revue finale de design, l'approvisionnement pour les modèles de qualification et de série (14 au total) va pouvoir commencer.
Les autres fournitures de l'Irfu pour Metis
L'Irfu est chargé de la conception et la fabrication du cryomécanisme du « dérotateur de champ » dont la fonction est de compenser la rotation de la Terre pour que l'image du ciel sur les détecteurs soit stable pendant les observations. Ce sera une première mondiale car jusqu'à présent, le dérotateur était toujours à l'extérieur du cryostat.
Pour l'intégration et les tests des cryomécanismes, l'institut s'est doté d'une plateforme dédiée rassemblant une zone d'intégration en salle propre et des cryostats utilisant des cryogénérateurs. Celle-ci est réservée au projet Metis jusqu'en 2024.
L'Irfu participe également à la caractérisation détaillée des détecteurs de Metis et met à la disposition du projet un équipement de tests des masques coronographiques, dans la gamme de longueur d'onde de 8 à 12 µm.