Nous savons depuis plus de 70 ans que les gènes codés par l’ADN sont transcrits en ARNs messagers puis traduits en protéines. Mais le mode de fonctionnement de nos cellules s’est avéré bien plus complexe. Participant à cette complexité et découverts chez de nombreux organismes eucaryotes au début des années 2000, les microARNs sont des ARNs qui ne codent pas pour une protéine. Longs d’une vingtaine d’acides nucléiques, ils répriment l'expression des gènes et en sont donc des régulateurs majeurs. Leur rôle a été démontré dans de nombreux mécanismes physiologiques et pathologiques. Dans certains cancers, par exemple, des microARNs participent à l’initiation et à la progression tumorales ainsi qu’à la formation des métastases. Chez l’Homme, 2500 microARNs sont répertoriés. Les mesures expérimentales de leur niveau d’expression ainsi que de leur rôle fonctionnel génèrent de grandes quantités de données qui sont difficiles à analyser en l’absence d’outils bioinformatiques dédiés.
Dans une précédente étude, des chercheurs du CEA-Irig ont construit des réseaux de microARNs[1]. L’objectif était de réutiliser les théories mathématiques développées avec l’essor des réseaux sociaux afin d’appréhender la complexité des liens entre l’ensemble des microARNs humains. Dans ces réseaux, chaque nœud (représenté par un cercle) correspond à un microARN ; deux nœuds sont reliés si les microARNs correspondants présentent des similarités. L’objectif de miRViz est de fournir un
site web en accès libre à tous les biologistes afin de leur permettre d’utiliser la puissance des réseaux pour analyser visuellement leurs données de microARNs. Cette nouvelle étude présente plusieurs exemples concrets d’utilisation impliquant des cellules cancéreuses, des cellules souches ou des données issues de patients atteints de cancers.
Par exemple, grâce à ce site web, les chercheurs ont repris les données publiques de patients atteints du carcinome cortico-surrénalien pour les analyser sous un nouvel angle. Ils ont ainsi pu retrouver visuellement les résultats initialement publiés, et ceci sans avoir besoin d'une expertise en programmation. Ils ont également pu mettre en évidence, pour la première fois, que l’expression de miR-29, un microARN exprimé dans ces tumeurs, est un marqueur pronostic favorable à la survie.
[1]Représentation mathématique et graphique où chaque microARN est représenté par un cercle. Deux cercles sont reliés si les microARNs correspondants sont voisins sur l’ADN ou répriment des gènes similaires, en fonction de la matrice choisie.