La chimie dite bio-orthogonale désigne un ensemble de réactions artificielles pouvant se dérouler dans un organisme vivant sans interférer avec sa propre activité biochimique. Elle permet, par exemple, de suivre le devenir d’un substrat d’intérêt (métabolite, inhibiteur d’enzyme, médicament, etc.) dans la cellule. La procédure consiste, dans un premier temps, à modifier ce substrat en lui greffant un groupe chimique fonctionnel qui n’affecte pas son activité biologique, avant de l’introduire dans la cellule. Dans un second temps, on introduit une sonde complémentaire du groupe fonctionnel, qui va réagir in situ avec ce dernier et marquer ainsi le substrat que l’on veut suivre. Le couplage entre un azoture (sur la sonde) et un alcyne (sur le substrat), deux fonctions chimiques non naturelles, est une des réactions bio-orthogonales les plus utilisées. Problème : elle est catalysée par le cuivre, métal cytotoxique, ce qui limite son utilisation dans les cellules vivantes.
Les chimistes du CEA-IBITECS, avec ceux de l’UDS, ont résolu le problème en créant une famille de composés comprenant à la fois un agent chélateur1 du cuivre (emprisonnant un seul atome de métal) et une fonction azoture. Muni d’un marqueur, un tel composé servira de sonde en allant se fixer à tout substrat d’intérêt auquel on aura auparavant greffé un groupe alcyne. Grâce à ces «azotures chélatants», la réaction peut se dérouler dans le sang ou la cellule, de manière non toxique et aussi rapidement qu’en milieu simple (le couplage s’effectue en moins de trente secondes).
Le champ ouvert est immense, allant de la chimie médicinale (assemblage de médicaments à des anticorps thérapeutiques…) à l’imagerie (traceurs à base de 64Cu) en passant par la pharmacologie (suivi des médicaments).
- Ligand capable de fixer un ion métallique, à la manière d'une pince