La chlordécone est un insecticide organochloré massivement utilisé pour lutter contre le charançon du bananier dans les Antilles Françaises de 1972 à 1993. Il est encore aujourd'hui à l'origine d'une importante pollution de l'environnement. Dans une étude précédente, une équipe de l'UMR Génomique Métabolique du Genoscope, département de l’institut CEA-Jacob, avait révélé la présence inattendue de produits de transformation de la chlordécone qui ne font pas l'objet de suivis systématiques dans l’environnement faute de méthodes d’analyse adaptées.
Cette équipe a donc mis au point une nouvelle méthode d'analyse de cet insecticide et de ses produits de transformation applicable aux eaux environnementales. Dans leur étude menée en collaboration avec des chercheurs de l’INRAE, du CIRAD, du BRGM et de l’Université de Lorraine, publiée dans Science of the total environment, cette méthode a été utilisée pour analyser une trentaine d’échantillons d'eaux des Antilles, en Guadeloupe et en Martinique. Ces échantillons ont également été analysés par deux laboratoires de référence : le BRGM et le LDA26.
Alors que les deux protocoles mis en œuvre par les laboratoires de référence utilisent une étape d'extraction liquide-liquide avec des solvants organiques, le protocole alternatif des chercheurs du Genoscope présenté dans l'article repose sur la technique de la micro-extraction sur phase solide pour extraire les composés de l'eau environnementale. Cette technique évite ainsi le recours à des solvants, concentre beaucoup l'échantillon et permet d'automatiser tout le processus d'analyse.
La méthode développée par les chercheurs a permis de mettre en évidence la présence de plusieurs produits de transformation non détectables jusque-là par les méthodes de routine utilisées. Elle va donc contribuer à améliorer la vision globale de la pollution à la chlordécone et de ses dérivés.
Étonnement, l’un des laboratoires de référence qui réalise en routine le suivi des eaux environnementales des Antilles, a donné des résultats incohérents par rapport à ceux des chercheurs et du second laboratoire de référence pour les échantillons les plus contaminés, les concentrations de chlordécone apparaissant nettement sur-estimées. L'origine des biais possibles est discutée par les chercheurs, qui avaient déjà pointés du doigt les limites d’une étude portant sur la durée de vie de la chlordécone dans les sols.
Ces résultats illustrent bien l’importance mais également la difficulté d’analyser la chlordécone et ses dérivés afin d’obtenir la vision la plus complète possible de la pollution et pouvoir prédire son évolution future.