En l'absence de traitement curatif de l'infection par le VIH (Virus de l'Immunodéficience Humaine), des traitements à vie, basés sur des combinaisons de plusieurs molécules antirétrovirales, sont nécessaires pour contrôler l'infection et la réplication du virus mais ne permettent pas son élimination de l'organisme. Malgré l'efficacité de ces traitements antirétroviraux combinés, qui améliorent sensiblement la qualité de vie des patients infectés par le VIH et leur espérance de vie, la persistance du virus dans l'organisme est associée à une inflammation chronique et un risque accru de comorbidités telles que les maladies cardiovasculaires, les troubles neurocognitifs et le cancer, qui contribuent à leur tour à l'inflammation chronique.
Les mécanismes exacts et les cellules impliqués dans la persistance d'une inflammation chronique ne sont toujours pas clairs. Il a été démontré que les monocytes et les macrophages, des cellules immunitaires appartenant à la lignée myéloïde, participent à l'activation immunitaire observée dans l'infection par le VIH. Les neutrophiles, les cellules myéloïdes circulantes les plus abondantes, ont en revanche été moins étudiés bien qu'ils soient fortement impliqués dans les lésions tissulaires et l'inflammation dans plusieurs maladies chroniques, en particulier les maladies auto-immunes.
Des chercheurs d'IDMIT (CEA-Jacob) en collaboration avec l'AP-HP et l'Institut Pasteur ont étudié les modifications phénotypiques et fonctionnelles des neutrophiles au cours de l'infection, contrôlée ou non par des traitements antirétroviraux, dans un modèle primate non-humain d'infection par le VIS (Virus de l'Immunodéficience Simienne, l'équivalent simien du VIH). Les résultats, parus dans la revue Frontiers in Immunology, permettent de caractériser les différentes sous-populations de neutrophiles en fonction du stade de l'infection et de l'inflammation chronique. Notamment, ils identifient des populations de neutrophiles immatures particulièrement présentes dans les cas de primo-infection et d'inflammation chronique, qui entraînent la production de cytokines et pourraient donc agir comme des cellules pro-inflammatoires. Les chercheurs montrent également l'implication de ces neutrophiles immatures dans la modulation de l'activité des lymphocytes T dans l'infection par le VIS.
Marquage par immunohistochimie de coupe de rate,
montrant la localisation des neutrophiles (marrons) à proximité de la pulpe
blanche (follicules lymphoïdes).
© G. Sandillon / IDMIT / CEA
Ces résultats ouvrent la voie à une meilleure
compréhension du rôle des neutrophiles immatures suite à une infection par le
VIS, et pourraient conduire à de nouvelles stratégies thérapeutiques pour
réduire l'inflammation chronique chez les patients atteints du VIH.