Le proton est composé de particules élémentaires – les quarks et les gluons – interagissant entre elles via l'interaction forte.
Sa structure interne a été étudiée à l'aide de collisions électron-proton de très haute énergie, au collisionneur HERA de Hambourg (Allemagne) entre 1992 et 2007. Ces expériences ont révélé qu'à ces énergies, la structure des protons est dominée par les gluons et que leur densité croît fortement avec l'énergie des collisions.
La saturation de la densité de gluons et ses fluctuations
Or des théoriciens prédisent une limite de cette croissance causée par la fusion de gluons, dictée par l'interaction forte entre les gluons, ce qui conduit à une « saturation » de leur densité. La mise en évidence expérimentale de cette saturation, non observée à HERA ni au LHC, est un pilier important du programme du futur collisionneur électron-ion (EIC), aux États Unis.
Dans le régime de la saturation, les fluctuations de la densité de gluons devraient être abolies car le proton est alors complètement « rempli » avec des gluons (limite dite du disque noir du proton). Les physiciens recherchent donc des observables sensibles aux fluctuations de la densité de gluons dans le proton afin de débusquer ce phénomène. Une tâche complexe dans un collisionneur de hadrons comme le LHC qui offre par ailleurs des énergies de collision bien plus élevées que celles d'HERA ou même du futur EIC.
Une première observation des fluctuations du proton au LHC
Une interaction du proton avec un photon produisant une particule formée d'un quark charme et de son antiquark (appelée J/ψ) pourrait être une telle observable. Lorsque le proton reste intact, elle est en effet sensible à la moyenne de la densité de gluons dans le proton et sinon, à l'amplitude de ses variations (variance).
Au LHC, les collisions entre protons et noyaux de plomb se prêtent bien à l'observation de ce processus. En effet, le noyau de plomb, chargé positivement et accéléré à des énergies ultra-relativistes, agit comme une source intense de photons et la particule J/ψ est facilement détectable par sa désintégration en deux muons
- La production de J/ψ sans dissociation du proton a pu être mesurée au LHC par les collaborations LHCb et ALICE dans des collisions proton-proton et proton-plomb.
- Une équipe d'ALICE menée par des physiciens de l'Irfu a récemment réussi à mesurer pour la première fois la section efficace de photoproduction de J/ψ avec dissociation du proton au LHC. Une mesure plus difficile que la précédente qui nécessite une meilleure compréhension des bruits de fond.
La précision des mesures d'ALICE est similaire à celle de HERA pour des collisions électron-proton, ce qui conforte le potentiel du LHC (ALICE et LHCb) pour des explorations à plus haute énergíe, bien au-delà du téraélectronvolt, en exploitant des collisions proton-plomb.