Les inondations survenues le 29 octobre 2024 en Espagne et celles des 18 et 19 octobre 2024 en France et en Italie sont le résultat d'intempéries d'une rare intensité. Elles ont été analysées par la collaboration européenne ClimaMeter, spécialiste des évènements météorologiques extrêmes. Selon les climatologues, ces conditions météorologiques particulières sont nées de la conjonction de deux phénomènes naturels, amplifiés par le réchauffement climatique : l'oscillation décennale pacifique (ODP) et l'oscillation multidécennale atlantique (AMO) qui sont des variations naturelles de la température à la surface des océans Pacifique et Atlantique.
L'oscillation du Pacifique (ODP) et celle de l'Atlantique (AMO) ont des conséquences sur le monde entier puisque la température des océans détermine la quantité d'eau évaporée (donc la quantité de pluie) et influence certains courants atmosphériques. Elles suivent des cycles de plusieurs décennies, indépendants les uns des autres, ce qui signifie que leurs effets sur une région varient d'une année à l'autre et peuvent entrer en résonance entre elles ou avec d'autres phénomènes.
Des évènements météorologiques sans précédent à cause du réchauffement climatique
Les inondations survenues en Espagne ont été causées par une dépression influencée par AMO et qui s'est dirigée vers l'Europe, avant de rencontrer un anticyclone qui l'a bloquée entre la péninsule ibérique et le Maroc. Cette dépression s'est alors amplifiée au-dessus de la mer, formant ce qu'on appelle une dépression isolée à haute altitude, aussi appelée goutte froide ou DANA en espagnol. Ce type de dépression est constitué de masses d'air très instables, contenant beaucoup d'eau et avec une haute énergie potentielle convective, des caractéristiques favorables à la formation d'orages. Pour le cas des intempéries en France et en Italie, il s'agit d'une conjoncture différente où les effets de AMO mais aussi ODP ont convergé simultanément dans la région.
Si ces évènements extrêmes sont nés de phénomènes naturels, leur intensité d'une ampleur inédite est en revanche le résultat du réchauffement climatique qui augmente de manière linéaire la température des océans et donc l'évaporation. « L'augmentation des températures globales et la modification des régimes de précipitations, sont des indices clairs de l'influence du changement climatique », nous explique Davide Faranda du LSCE, coordinateur de ClimaMeter.
ClimaMeter, une méthodologie comparative qui évolue au fil des évènements
Afin d'analyser les phénomènes climatiques extrêmes, la collaboration ClimaMeter utilise une méthode comparative qui consiste à identifier des conditions météorologiques similaires survenues par le passé et pour lesquelles il existe déjà une documentation. Cette méthode évite ainsi le recours à des modélisations coûteuses en temps et en ressources, et permet de constater l'évolution du climat au cours des années.
La méthodologie comparative risque cependant d'atteindre ses limites à cause du dérèglement climatique qui favorise l'apparition d'évènements météorologiques sans précédent. « C'est pourquoi nous prévoyons d'intégrer des approches complémentaires, comme des modèles climatiques haute résolution, afin d'analyser des situations où les analogues passés sont insuffisants. Cela nous permettra d'étendre la portée de ClimaMeter et de mieux prévoir les impacts de futurs événements météorologiques extrêmes », conclut Davide Faranda.