Les supernovae de type Ia (SN Ia) résultent de l'explosion d'une naine blanche dans un système binaire. Relativement homogènes, elles ont été utilisées comme « chandelles standard » pour estimer les distances des galaxies dans l'Univers, ce qui a notamment permis de mettre en évidence l'expansion accélérée de l'Univers. Cependant, il n'y a actuellement pas de consensus sur la façon dont elles explosent ni sur la nature de leur compagne dans le système binaire.
L'explosion d'une SN Ia est déclenchée par un transfert de masse de l'étoile compagne vers la naine blanche. Mais elle peut aussi, plus radicalement, résulter de la fusion de deux naines blanches. Deux principaux mécanismes d'explosion sont actuellement retenus :
- une onde de combustion explosive (déflagration) suivie de la détonation du cœur de la naine blanche ;
- une double détonation.
Dans les deux cas, la destruction de la naine blanche est complète.
Quelle est la nature de l'étoile compagne ? S'agit-il d'une étoile en phase de fusion de l'hydrogène ou de l'hélium ou d'une seconde naine blanche ?
Les astrophysiciens ont tenté sans succès d'identifier les compagnes survivantes dans les restes de supernovae historiques. Mais en 2018, ils ont découvert dans notre Galaxie, grâce à l'observatoire spatial européen GAIA, trois naines blanches, animées de vitesses exceptionnelles, qu'ils ont interprétées comme des survivantes de SN Ia.
En effet, dans le cas de deux naines blanches en orbite serrée sur le point de fusionner, un transfert de masse instable peut provoquer l'explosion de la naine blanche la plus massive, laissant la naine blanche compagne s'échapper à très grande vitesse. Ce modèle récent d'explosion est appelé Dynamically Driven, Double-Degenerate, Double Detonation (ou D6).
Dans ce contexte, les chercheurs ont modélisé numériquement en 3D l'évolution hydrodynamique d'une supernova D6, de son explosion jusqu'à sa phase de reste de supernova, âgé de plusieurs milliers d'années.
Le code de simulation numérique 3D utilisé (RAMSES) a été développé et adapté à l'évolution des restes de supernova à l'Irfu. Une grille élaborée permet en particulier de suivre l'expansion de la matière éjectée et sa résolution est encore augmentée par le raffinement du maillage adaptatif de RAMSES afin de suivre les structures générées par les ondes de choc.
La double détonation, la proximité de la naine blanche compagne, et les vitesses élevées du système binaire produisent des structures asymétriques caractéristiques de la supernova D6, parmi lesquelles :
- une protubérance des éjectas située à l'opposé du lieu de la détonation initiale dans la couche d'hélium, qui se dissipe après plusieurs centaines d'années ;
- un pic de densité au cœur des éjectas, résultant de la seconde détonation ;
- un décentrage de la matière éjectée par rapport au point d'explosion de la supernova généré par la vitesse initiale de la naine blanche dans le système binaire ;
- un important cône « d'ombre » généré par la présence de la compagne qui se traduit par une zone moins dense, entourée d'un anneau plus dense, riche en instabilités hydrodynamiques.
Cette dernière signature est la plus marquée et la plus durable dans l'évolution du reste de supernova.
La prochaine étape consistera à produire les cartes d'émission en rayons X d'un reste de SN Ia D6 pour les confronter aux observations existantes, ainsi que les spectres associés à haute résolution spectrale qui seront accessibles avec le futur grand observatoire spatial européen en rayons X Athena.