Le Brésil connaît un fort déclin des politiques de protection de l'environnement depuis le changement de gouvernement en 2019. Cependant, aucune étude n'avait encore quantifié l'impact de cet événement sur les stocks de carbone du pays.
La forêt amazonienne, dont plus de 60 % sont situés au Brésil, subit des dégradations multiples, dues aux activités humaines et aux aléas climatiques. Ainsi, des surfaces situées en bordure de zones déboisées sont fragilisées tandis que d'autres sont affectées par des coupes d'arbres ponctuelles ou des incendies. Par ailleurs, la sécheresse augmente la mortalité des arbres et favorise la perte de branches et de feuilles.
Si la déforestation peut être suivie grâce à des images satellites, les autres dégradations de la forêt sont beaucoup plus difficiles à observer. Il est néanmoins possible d'évaluer leur impact sur la biomasse forestière grâce à l'indice satellitaire de végétation L-VOD, développé par des chercheurs de l'INRAE, du CEA et du CNRS. En utilisant cet indice, ainsi qu'une nouvelle technique de suivi de la déforestation mise au point par l'Université d'Oklahoma, la collaboration a pu déterminer l'évolution du stock de carbone de la forêt amazonienne brésilienne entre 2010 et 2019.
L'étude met en évidence une nette augmentation de la déforestation en 2019 (3,9 millions d'hectares). Celle-ci est supérieure de 30 % à celle observée en 2015 lors de l'épisode de sécheresse extrême El Niño (3 millions d'hectares) et a été multipliée par 4 par rapport aux années 2017 et 2018 (1 million d'hectares).
Mais en prenant aussi en compte les autres dégradations de la forêt, il s'avère que les pertes de carbone de la forêt étaient trois fois plus importantes en 2015 qu'en 2019 ! Ce résultat souligne le rôle crucial du climat qui, au cours de l'épisode El Niño de 2015, a très fortement affecté la forêt, via l'augmentation de la mortalité des arbres et les dégradations imputables aux feux.
Globalement, les chercheurs observent une inversion de tendance historique du rôle de stockage du carbone de la forêt brésilienne. En effet, durant la période 2010-2019, la forêt amazonienne brésilienne a perdu 1 % de son stock de carbone, principalement en raison des dégradations de la forêt (hors déforestation), dont l'impact est trois fois supérieur à celui de la déforestation.
Les politiques de protection de l'environnement devraient donc prendre en compte les dégradations des forêts dans leur ensemble, et non pas seulement la déforestation, afin de préserver leur capacité de stockage du carbone, essentielle pour atténuer le changement climatique.