Le cerveau est un organe extraordinairement bien protégé de son environnement. En particulier, les échanges entre sang et cerveau sont très régulés et limités en comparaison avec d’autres organes. Cette « barrière hémato-encéphalique », est vitale, notamment pour protéger le cerveau des infections. Elle devient problématique lorsque l’on cherche à apporter une quantité suffisante de molécules thérapeutiques au cerveau. L’émission à travers le crâne d’ultrasons de basse intensité combinée à l’injection intraveineuse de microbulles gazeuses – déjà utilisées en échographie diagnostique – est actuellement une piste prometteuse pour résoudre ce problème. En effet, sous l’action des ultrasons pulsés, les microbulles entrent en oscillation et induisent un stress mécanique des parois capillaires. Il en résulte une augmentation transitoire de la perméabilité des vaisseaux sanguins cérébraux à la focale du faisceau ultrasonore. Cette intervention absolument non invasive dure seulement quelques minutes. La précision est assurée en guidant l’injection des microbulles et le faisceau d’ultrasons par IRM. Pour autant, la puissance acoustique délivrée reste mal contrôlée. Des effets délétères dus aux ultrasons ne peuvent pas être évités et l’efficacité de délivrance de molécule ne peut pas être garantie.
Les chercheurs de Neurospin et de MIRCen ont développé un dispositif innovant qui permet un contrôle fin de la puissance acoustique. Amagnétique et suffisamment compact, il permet d’ajuster dynamiquement cette puissance en maîtrisant l’activité d’oscillation des microbulles (on parle d’activité de cavitation), fonctionnalité clef pour garantir à la fois l’efficacité, la reproductibilité et surtout la sécurité du protocole. Grâce à ce dispositif, les équipes ont montré, après injection intraveineuse d’un agent de contraste IRM à un primate non humain, que la quantité de l’agent ayant franchi la barrière hémato-encéphalique est 6 fois supérieure à celle habituellement observée.
Ce banc expérimental va être utilisé dans un premier temps pour développer de nouvelles approches thérapeutiques des maladies neurodégénératives. Ces travaux ouvrent aussi la voie au développement d’un dispositif médical plus complexe optimisé pour l’Homme. A terme, de nombreux médicaments qui n’entrent pas ou insuffisamment dans le cerveau pourront y être délivrés localement. Petites molécules de chimiothérapie, anticorps thérapeutiques, vecteurs de thérapie génique..., les pathologies bénéficiant de cette innovation sont potentiellement nombreuses : en premier lieu les cancers du cerveau (glioblastomes) mais aussi les maladies neurodégénératives, immunitaires ou psychiatriques.
Un projet innovant soutenu financièrement
Ces travaux ont bénéficié du soutien du programme « Technologies pour la Santé » du CEA, du programme « Fonds européen de développement régional » (FEDER) de l’union européenne, du groupement d’intérêt scientifique IBiSA et de l’infrastructure nationale NeurATRIS (www.neuratris.com). Le contrat d'un post-doctorant dédié à ce projet et une grande partie du dispositif expérimental ont été financés sur les fonds propres de MIRCen.
Un projet de développement du même dispositif médical adapté à l’Homme a été récemment financé par une ANR Technologies pour la Santé (ANR 3BOPUS) et soutenu par les pôles de compétitivité Medicen (http://www.medicen.org/) et Alsace BioValley (http://www.alsace-biovalley.com/fr/).