L'irradiation aux ions lourds sur la ligne IRRSUD du Ganil à Caen permet de déplacer des atomes au sein d'un matériau, et ainsi, d'introduire des défauts susceptibles de modifier ses propriétés (électroniques, optiques, etc.).
À basse fluence, l'impact de chaque ion est bien séparé des autres. Sa trace à la surface du matériau dépend de la nature de l'échantillon et des conditions d'irradiation choisies (masse, énergie et angle d'incidence de l'ion). Elle peut prendre la forme d'un nano-cratère ou d'une nano-bosse ou encore celle d'un chapelet de nano-bosses lorsque l'angle d'incidence est rasant (voisin de 90°). Une irradiation à basse fluence sur IRRSUD a ainsi notamment permis à des chercheurs du Centre de recherche sur les ions, les matériaux et la photonique (CIMAP) d'obtenir des nanostructures régulières à la surface de titanate de strontium monocristallin (SrTiO3).
Jusqu'à présent, ces nanostructures n'avaient été étudiées qu'à basse fluence mais que se passe-t-il en incidence rasante et à haute fluence ?
Pour le savoir, les scientifiques ont cette fois irradié à haute fluence un monocristal de SrTiO3 avec des d'ions de xénon 129Xe23+ (de 92 MeV) ou 136Xe19+ (de 75 MeV).
- Ils notent la formation d'ondulations régulières à la surface de l'échantillon, présentant une taille caractéristique et orientées perpendiculairement à la direction du faisceau d'ions. La périodicité et la largeur des ondulations varient avec l'angle d'incidence des ions.
- Des caractérisations structurales montrent la formation d'une couche supérieure amorphe dont la surface est le lieu d'une déformation plastique anisotrope, à l'origine des ondulations.
Alors que l'irradiation à basse fluence conduit à des nanostructures isolées dans la direction du faisceau incident, la haute fluence permet de créer des microstructures surfaciques avec un contrôle précis de leurs caractéristiques, en jouant sur les paramètres d'irradiation.
Dans de futures expériences, les scientifiques exploreront les différentes phases obtenues grâce à ces irradiations et s'attacheront à comprendre la transition entre les nanostructures créées le long du faisceau incident à basse fluence et les ondulations observées à haute fluence dans la direction perpendiculaire.