« Contrairement à ce qui était souvent admis, la déformation induite par les réactions catalytiques se propage de façon très hétérogène dans une nanoparticule et opère dans tout son volume, pas seulement à sa surface », annoncent Marie-Ingrid Richard, physicienne au CEA-Irig, et Frédéric Maillard, électrochimiste au CNRS. Avec leur groupe de recherche et dans le cadre d'un contrat ERC, ils sont parvenus à étudier une nanoparticule unique de platine pendant qu'elle fonctionne, « ce qui n'avait jamais été fait auparavant dans un milieu liquide », ajoutent-ils. De fait, la déformation d'une particule est intimement liée à l'activité catalytique et influe donc directement sur la vitesse de la réaction qu'elle catalyse. La prouesse d'avoir pu la mesurer va permettre d'améliorer la performance des nanocatalyseurs, notamment dans les piles à combustible et les électrolyseurs de l'eau.
Les nanocatalyseurs offrent de nombreux avantages par rapport aux catalyseurs conventionnels : leur dimension nanométrique présente un bien meilleur rapport structure-performance qui augmente leur activité et sélectivité catalytique et réduit la consommation énergétique, ainsi que le coût des procédés chimiques. Mais ce sont des particules très complexes à étudier. Tout au plus avait-il été possible d'établir leur performance à l'échelle de la centaine de nanoparticules, avec une information moyenne sur leurs propriétés structurales et les contributions respectives de leurs différents sites catalytiques.
Une déformation hétérogène dans tout le volume du nanocatalyseur
Aujourd'hui, c'est une nanoparticule de platine unique qui se révèle : sa structure 3D, sa forme, ses facettes ainsi que la distribution des déformations, via le déplacement des atomes, lors de son activité catalytique. « Nous avons pu observer que la distribution de la déformation s'exerce de manière hétérogène, particulièrement au niveau des arêtes, coins et facettes de la particule. La deuxième découverte majeure est qu'elle dépend du potentiel électrique appliqué et qu'elle se propage dans tout le volume sous l'effet des liaisons entre les ions et la surface », explique la chercheuse, précisant que ces résultats n'auraient pu être obtenus sans l'ESRF, source de rayons X la plus puissante au monde permettant d'imager des objets et phénomènes complexes à des résolutions extrêmes.
Les chercheurs poursuivent à présent des travaux théoriques en vue de pouvoir synthétiser la prochaine génération de catalyseurs avec une activité, une sélectivité et une durée de vie adaptées.