Les leucémies concernent plus d'un tiers des cancers chez l'enfant, les formes aiguës étant les plus fréquentes. Pour ces dernières, les cellules cancéreuses sont issues de précurseurs immatures et anormaux de globules blancs, qui se multiplient de façon anarchique sans finir leur maturation. Ils ne peuvent plus remplir leurs fonctions. En outre, ils envahissent la moelle osseuse et empêchent la croissance et la différenciation des autres cellules sanguines. Une équipe de l'Institut François-Jacob s'intéresse aux leucémies aiguës lymphoïdes chez l'enfant, les leucémies aigües affectant les lymphocytes T. Elle a mis en évidence l'importance d'un facteur épigénétique.
« Nous cherchons les raisons de l'arrêt du développement des lymphocytes T, explique Irina Naguibneva, biologiste à l'Institut François-Jacob. Pourquoi certaines protéines, nécessaires à ce développement, sont-elles insuffisantes ou inopérantes ? » Les chercheurs ont regardé du côté des micro-ARN, ces petits facteurs épigénétiques qui ont une grande influence sur la production des protéines. « Certains micro-ARN ciblent les ARN messagers, les grands ARN qui génèrent les protéines à partir des gènes, ajoute la scientifique. Nous avons montré qu'un micro-ARN spécifique est directement relié à la présence de la protéine TLX3, connue pour son action dans la leucémie aiguë lymphoïde T. »
Pour cela, les chercheurs, en collaboration avec des hématologistes, biologistes et cliniciens de l'hôpital Trousseau, ont analysé l'expression de plus de 700 micro-ARN chez 41 jeunes patients. Ils ont trouvé qu'une famille de micro-ARN, incluant miR-125b, déjà connu pour son rôle dans d'autres cancers, est dérégulée dans un groupe de ces leucémies T. Cette famille se caractérise par l'expression inappropriée de la protéine TLX3. miR-125b est-il également acteur dans ce type de leucémie ? « Notre analyse fonctionnelle montre un lien direct entre son expression et celle de TLX3, répond Irina Naguibneva. Que ce soit in vitro ou in vivo (modèle murin), la surexpression de TLX3, impliquant le blocage du développement des lymphocytes T, est associée à l'induction de miR-125b. » Ce lien pourrait permettre aux chercheurs d'expliquer une partie des mécanismes de la protéine TLX3. Aussi, miR-125b pourrait s'avérer un bon candidat pour diagnostiquer la maladie.