Les quasars sont des sources extrêmement lumineuses et donc particulièrement intéressantes pour observer l'Univers lointain. Leur luminosité est due à la présence d'un trou noir supermassif qui attire la matière dans son disque d'accrétion.
Pour atteindre l'Univers très lointain, les astrophysiciens observent plutôt l'absorption de la lumière des quasars par les « nuages » d'hydrogène situés le long de la ligne de visée. Du fait de l'expansion de l'Univers, les raies d'absorption (Lyman-α) de chaque nuage présentent des « décalages vers le rouge » (par effet Doppler) tous différents. L'ensemble forme donc une « forêt » touffue qui révèle la répartition unidimensionnelle des nuages d'hydrogène, et donc de la matière, à des distances comprises entre 10 et 12 milliards d'années-lumière (al).
Cependant, seule une approche tridimensionnelle permet d'accéder aux propriétés statistiques de la distribution de la matière. À très grande échelle, celles-ci recèlent en particulier l'empreinte de l'inflation – une expansion extrêmement violente de l'Univers primordial – et celle d'oscillations de matière qui se sont produites avant que les électrons et ions s'assemblent en atomes. À plus petite échelle, elles sont impactées par la masse des neutrinos et les propriétés de la matière noire.
Les cosmologistes de l'Irfu ont participé à l'exploitation des données de forêt Lyman-α recueillies par l'observatoire de la fondation Sloan au Nouveau-Mexique (États-Unis) dans le cadre de Sloan Digital Sky Survey (SDSS) / eBOSS (Extended Baryon Oscillation Spectroscopic Survey). Plus précisément, ils ont adapté aux données eBOSS un algorithme tomographique analogue à ceux de l'imagerie médicale et ont produit la tomographie d'un volume d'Univers près de cent fois plus étendu qu'auparavant. La résolution spatiale de cette reconstruction (environ 40 millions d'al) est limitée par la séparation entre les lignes de visées des quasars. Le cube de données est consultable sur la plateforme Sketchfab.
À partir de cette carte, l'équipe a déjà pu établir un premier catalogue de grands vides cosmiques détectés au-delà de 10 milliards d'al.
La technique de tomographie Lyman-α sera exploitée pour le grand relevé DESI (Dark Energy Spectroscopic Instrument), en cours de démarrage en Arizona (États-Unis) et dans lequel l'Irfu est largement impliqué.
Son développement et son exploitation scientifique ne font que commencer !