L'Ouest du Pacifique est une région clé pour les échanges de grandes masses d'eau dans l'océan. Pourtant les reconstructions paléo-océanographiques y sont encore très pauvres, notamment en ce qui concerne la « circulation profonde ». Non pas faute de matière : l'énorme masse de sédiments continentaux déversés chaque année par les grands fleuves et rivières de montagne dans cette mer constitue une archive paléo-océanographique unique. L'explication est plutôt à chercher dans la méconnaissance de la provenance des sédiments et de leur transport, depuis leur source jusqu'à leur site de dépôt. Ces informations sont en effet essentielles pour reconstruire l'histoire des courants dans une mer entourée de terres continentales.
Pour en savoir plus, des chercheurs du LSCE ont étudié des sédiments fluviatiles sur tout le pourtour de la Mer de Chine du sud et leur transport actuel et passé en mer. Ils ont observé une diversité significative de la minéralogie magnétique dans les sédiments fluviatiles du nord au sud du bassin. Celle-ci se retrouve en mer, avec un contraste moindre, en raison de mélanges contrôlés par la circulation profonde.
Plus récemment, ces connaissances ont été utilisées pour interpréter des enregistrements du passé à partir de sept carottes marines longues, distribuées du nord au sud de la Mer de Chine du sud, à des profondeurs d'eau différentes. Selon leurs résultats, la minéralogie magnétique à terre reste stable dans le temps et sa distribution en mer résulte seulement de l'action combinée des changements de niveaux marins et de la circulation océanique.
Quand les grandes plateformes continentales de cette région sont émergées lors des périodes de bas niveau marin, la circulation marine est ralentie et le sédiment qui se dépose provient des régions immédiatement adjacentes. Au contraire, à haut niveau marin, la circulation reprend, transportant du sédiment, probablement d'origine taïwanaise ou philippine, jusqu'aux régions sud où il se mélange avec les sédiments d'origine locale.
Les deux enregistrements les plus longs montrent que ce schéma se répète régulièrement depuis 900 000 ans. Superposée à cette périodicité de 100 000 ans, une tendance de long-terme se dégage clairement, avec un maximum de circulation profonde, il y a environ 500 000 ans, coïncidant avec des changements dans la circulation océanique globale et le cycle du carbone.
La circulation profonde en Mer de Chine du sud, avec ses particularités, est donc reliée à l'évolution de la circulation globale et participe aux variations du cycle global du carbone.