Les émissions de CO2 liées à l'utilisation des énergies fossiles et à la production de ciment sont la première cause du changement climatique. Pour ne pas dépasser un réchauffement de 2°C, elles devront être fortement réduites au cours du siècle. Elles sont habituellement estimées par les États sur la base d'inventaires de données énergétiques et ne sont publiées que deux ans après l'émission.
Le choc de la Covid-19 sur les activités humaines et le recul économique attendu ont des conséquences sans précédent sur la dynamique des émissions de CO2 fossile. Or, il n'existait pas d'estimation des émissions en temps quasi-réel qui permette de suivre cette évolution.
Plusieurs chercheurs du LSCE ont relevé ce défi avec l'initiative Carbon Monitor, en collaboration avec l'Université de Tsinghua à Pékin (Chine) et l'Université de Californie à Irvine (États-Unis). Ils ont mis en place une collecte et un traitement automatisé de nouveaux jeux de données d'activités émettrices de CO2 fossile – souvent disponibles en temps réel – sur le transport routier, la mobilité des personnes, le transport aérien, la consommation journalière de gaz et d'électricité, ainsi que des données mensuelles de production industrielle.
Le site www.carbonmonitor.org en ligne depuis le 17 juin 2020 publie ces données avec des outils de visualisation interactifs, à l'adresse de la communauté scientifique et du grand public. Les émissions sont consultables pour cinq grands secteurs économiques et seront régulièrement mises à jour. La baisse des émissions liée à la Covid-19 atteint 7,2 % entre le 1er janvier et le 30 avril 2020 et 7,8% en prenant en compte la réduction du trafic aérien international – le transport routier apportant la plus forte contribution à cette diminution. Il semble que les émissions en Chine ont rapidement augmenté dès la fin du confinement et ont même retrouvé des niveaux supérieurs à ceux de 2019.
Ces nouvelles estimations dynamiques montrent aussi l'effet des anomalies climatiques sur les émissions et l'impact des vacances et des week-ends dans chaque pays. Elles pourront être utilisées pour comprendre les changements de polluants « co-émis » avec le CO2 dans la combustion des énergies fossiles, comme les oxydes d'azote et le monoxyde de carbone.