La miniaturisation des dispositifs CMOS se heurte aujourd'hui à des courants de fuite de plus en plus pénalisants et à d'autres limitations fondamentales. Parmi les voies explorées pour dépasser les limitations de la technologie CMOS en logique complexe, la magnonique apparaît prometteuse : les ondes de spin peuvent avoir des longueurs d'onde très courtes, ce qui permet leur emploi dans des dispositifs nanométriques et leur modulation à très haute fréquence, potentiellement jusqu'au térahertz. Encore faut-il pouvoir les produire, les manipuler et les détecter dans des matériaux compatibles CMOS, à l'aide de techniques miniaturisables.
Dans cette perspective, une équipe de l'Inac a produit et transporté des ondes de spin dans un guide d'onde Ta/Co8Fe72B20/MgO, un empilement de couches présent dans les mémoires magnétiques STT-MRAM (Spin-transfer torque magnetic random-access memory). Leur vecteur d'onde est contrôlé grâce à un champ magnétique « excitateur », engendré par un conducteur perpendiculaire au guide d'onde et parcouru par un courant.
Leur détection utilise l'effet Hall de spin inverse qui convertit un courant de spin – un flux de moments de spin lié ou non à un flux d'électrons – en courant classique. Le dispositif a été testé avec succès jusqu'à des longueurs d'onde de spin aussi courtes que 150 nm sans que le résultat de la mesure ne dépende du vecteur d'onde. Des mesures spectroscopiques complémentaires montrent que l'excitation des ondes de spin est locale et que le dispositif détecte la dynamique d'ondes de spin localisées. De plus, grâce à un choix judicieux de l'épaisseur de Co8Fe72B20, la durée de vie des ondes de spin dans Ta/Co8Fe72B20/MgO est comparable à celle obtenue dans des matériaux « magnoniques » plus épais comme Ni81Fe19.