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Zoom sur la gestion de l’absorption du phosphate chez les plantes


Par quels mécanismes les plantes puisent-elles le phosphate des sols pour pousser ? Une équipe du CEA-IBEB répond à cette question par ingénierie génétique. Avec des applications potentielles en agronomie.

Publié le 10 août 2015

Le phosphate (PO43-) est l'un des éléments nutritifs essentiels pour la croissance et le développement des végétaux. Les plantes possèdent plusieurs protéines, dénommées PHT1, qui absorbent  le phosphate au niveau des racines et le transportent vers les feuilles et les fleurs. Des chercheurs du CEA-IBEB ont tenté de comprendre le rôle de PHT1-1, 1-2, 1-3 et 1-4 par ingénierie génétique en éliminant les gènes qui les expriment. « Nous avons tout d'abord créé un mutant triple chez la plante modèle Arabidopsis thaliana. Ce mutant est dépourvu des protéines PHT1-1, 1-2, et 1-3, raconte Elena Marin, chercheuse au CEA-IBEB. Nous avons utilisé un microARN artificiel pour « éteindre » simultanément  les 3 gènes. » Les biologistes ont ensuite conçu un autre mutant pour lequel le gène PHT1-4 est, lui aussi, réduit au silence par une mutation insertionnelle1.

« Dans le premier cas, la plante n'affiche aucun problème de croissance poursuit la scientifique. La présence de PHT1-4 gomme certainement l'absence des trois autres transporteurs. Ce que nous avons démontré avec le quadruple mutant qui, en revanche, est très affaibli. » En effet, ce dernier possède une capacité d'absorption du phosphate fortement réduite (12-14%) par rapport à la plante sauvage. Les chercheurs ont défié plus avant Arabidopsis thaliana en éliminant, en plus des gènes PHT1-1 à PHT1-4, la protéine membranaire PHF1. Celle-ci chaperonne les PHT1s en les conduisant jusqu'à la membrane cellulaire où l'absorption du phosphate a lieu. La capacité d'absorption plonge ici à 5 % de celle de la plante sauvage. Dans tous ces cas, les biologistes ont déterminé les capacités d'import et de transfert du phosphate, en démontrant une grande capacité d'ajustement. « Les plantes s'adaptent à la nature des sols en modulant leur niveau de transporteurs et leur affinité pour le phosphate afin d'optimiser leur croissance et leur rendement », souligne Elena Marin.

Cette étude pourrait avoir des applications en agronomie. En effet, les chercheurs disposent maintenant d'outils génétiques performants pour étudier les régulations des protéines PHT1s (modifiées par génie génétique) dans de nouvelles lignées de plantes, possédant le plus faible niveau de transport de phosphate jamais décrit. Ces recherches pourraient, à l'avenir, contribuer à la réduction de l'apport phosphaté dans les cultures.

 

Capacités d'absorption du phosphate d'Arabidopsis thaliana dans différentes conditions. © CEA

 

Les phosphates en agriculture
Les engrais phosphatés ont fait leur apparition dès la fin du XIXè siècle en France, tout d'abord sous forme de poudre d'os ou de résidus de raffinerie. Leur utilisation s'est progressivement intensifiée. Elle est aujourd'hui incontournable pour nourrir les sols agricoles carencés. Les engrais sont aujourd'hui issus de l'exploitation de roches sédimentaires d'apatite, riches en phosphore (essentiellement au Maroc, en Chine, aux Etats-Unis, etc.). Avec la nécessité de nourrir une population croissante, la spéculation des vendeurs qui s'alignent sur le prix des céréales (en nette hausse) et les réserves qui s'amenuisent, les prix flambent depuis le début des années 2000.

  1. Insertion d'un fragment d'ADN dans ou au voisinage du gène d'intérêt pour l'inactiver.

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