La maladie d'Alzheimer est une démence majeure qui touche environ un million de personnes en France. Elle est liée à la présence de deux lésions principales : des dépôts de protéines amyloïde-β et des accumulations de protéines tau anormales dans les neurones. L'accumulation de ces protéines tau anormales est fortement associée aux troubles cognitifs qui caractérisent la maladie. Des études basées sur des observations post-mortem de cerveaux humains ont établi que l'administration accidentelle de composés contaminés par de l'amyloïde-β lors d'actes médico-chirurgicaux peut induire une pathologie amyloïde-β (76 cas ont été décrits dans le monde1). Une des difficultés pour étudier la transmission des lésions amyloïde-β/tau chez l'homme est le long délai, de plusieurs décennies, entre l'acte médico-chirurgical potentiellement déclencheur et la survenue de la pathologie.
Dans une publication récemment parue dans Acta Neuropathologica Communications, des chercheurs du Laboratoire des Maladies Neurodégénératives (LMN) de MIRCen (CEA-Jacob) démontrent expérimentalement pour la première fois que, en plus de la pathologie amyloïde-β, la pathologie tau est également transmissible par inoculation d'échantillons d'un cerveau malade à un autre sain (ici de l'humain à un primate non-humain, dont l'environnement cérébral est proche de celui de l'humain). Les lésions transmises, typiques de la maladie d'Alzheimer, se propagent pour coloniser l'ensemble du cerveau. Alors que les répercussions cliniques et cognitives de la transmission amyloïde-β/tau restent encore peu documentées, l'équipe du LMN démontre que cette transmission est associée à l'apparition de troubles de la mémoire.
L'inoculation intracérébrale d'extraits de cerveaux de patients atteints de la maladie d'Alzheimer à des primates non-humains induit des lésions microscopiques typiques de la maladie d'Alzheimer (amylose et tauopathie) qui diffusent depuis le point d'inoculation vers l'ensemble du cerveau. Ces altérations sont associées à l'apparition de troubles cognitifs.
Cette étude est importante pour plusieurs raisons : elle confirme que les lésions amyloïde-β caractéristiques de la maladie d'Alzheimer sont transmissibles, et démontre que les lésions dues à des protéine tau anormales le sont également. Ces données renforcent la nécessité d'organiser un suivi systématique des individus qui ont été confrontés à des procédures médico-chirurgicales associées à un risque de transmission de protéines amyloïde-β et tau. Enfin, les résultats apportent la preuve que les primates non-humains inoculés avec des extraits de cerveaux de patients atteints de la maladie d'Alzheimer représentent un modèle pertinent pour l'étude de la pathologie et de sa transmission.
1 Dhenain, M., 2021. Transmission iatrogène des protéines β-amyloïde et tau : Importance clinique et pour la recherche biomédicale sur la maladie d'Alzheimer. Bulletin de l'Académie Nationale de Médecine 205(7), 792-799.
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