Les maladies à prions sont des maladies rares, caractérisées par une dégénérescence du système nerveux central et la formation d'agrégats infectieux d'une protéine spécifique, la protéine du prion (PrP).
La transmission interindividuelle des maladies à prions est étudiée depuis de nombreuses années. Les travaux réalisés sur les modèles d'étude de primate non-humain (PNH) ont permis de montrer que ces maladies pouvaient être transmises par inoculation, inaugurant ainsi le concept d'encéphalopathie subaiguë spongiforme transmissible. Ces maladies sont caractérisées par une évolution rapide et fatale, ainsi que par l'absence de traitement. Chez l'Homme, les maladies à prions se présentent sous trois formes épidémiologiques : la forme sporadique (maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) survenue isolée, cette forme représente la majorité des cas), les formes familiales ou génétiques (associées à une mutation dans le gène codant pour la protéine du prion) et les formes acquises, la transmission étant iatrogène (transmission liée à certains actes médicaux) ou par ingestion de produits d'origine animale contaminés comme pour les patients atteints par la maladie de la « vache folle » (Encéphalopathie Spongiforme Bovine - ESB), variante de la MCJ.
Dans les formes acquises survenues lors de contaminations par voies dites périphériques (voie orale ou intraveineuse), les prions se répliquent tout d'abord dans les organes lymphoïdes (ganglions lymphatiques, rate) avant d'envahir le système nerveux central. Dans l'article publié dans la revue Acta Neuropathologica, les chercheurs du SEPIA ont mis en évidence un nouveau mode de transmission des prions en utilisant comme modèle expérimental un primate non humain infecté par la souche de prion ESB/vMCJ. Plus de sept ans d'incubation silencieuse après l'inoculation d'un échantillon infectieux dans le doigt, les premiers signes comportementaux et neurologiques ont été observés. Les études biochimiques ont confirmé la présence de la protéine du prion anormale (PrPd) dans le système nerveux central. L'analyse histopathologique a mis en évidence la présence de lésions spécifiques des maladies à prions et une signature propre à la vMCJ.
Des dépôts originaux de PrPd ont été mis en évidence dans des cellules de Schwann (cellules gliales assurant la myélinisation des axones) du nerf médian (nerf innervant le médius injecté), les cellules satellites et les cellules ganglionnaires des ganglions rachidiens postérieurs. À l'inverse, tous les organes lymphoïdes étaient dépourvus de PrPd contrairement aux individus exposés par voies orale ou intraveineuse. Les chercheurs ont donc proposé l'hypothèse d'une stricte neurotransmission après une contamination dans une zone très innervée : d'abord lente et progressive tout au long du nerf infecté (de proche en proche via les cellules de Schwann) jusqu'au relai ganglionnaire rachidien (au niveau de la moelle épinière) puis plus forte dans la moelle et le système nerveux central, après l'atteinte neuronale.
Des articles de revues de neuropathologie humaine et expérimentale ont déjà fait état de lésions « adaxonales » (adjacentes aux axones), mais cette étude apporte un nouvel éclairage quant à l'illustration immunopathologique de l'atteinte des cellules de Schwann.
Ces résultats suggèrent par conséquent la possibilité d'une neuroinvasion directe dans le cadre d'une contamination au niveau de zones très innervées comme les doigts, et soulignent la nécessité de procédures très strictes en cas de contamination humaine accidentelle.