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Le vieillissement très non linéaire du verre


​​​À l'aide d'un dispositif expérimental original, des chercheurs de l'Iramis ont réalisé des excitations thermiques ultra-rapides de verres moléculaires, qui leur permettent d'explorer la dynamique des verres très loin de l'équilibre.
Publié le 22 novembre 2023

Les verres minéraux, organiques ou métalliques forment une famille de solides dont la structure désordonnée, encore mal comprise, est à l'origine de propriétés spécifiques.

Comment se forme un verre ? À partir d'un liquide surfondu (en dessous de la température de cristallisation) qui voit sa viscosité augmenter lorsqu'on abaisse sa température. À l'échelle moléculaire, sa dynamique ralentit fortement jusqu'à la température de transition vitreuse (Tg), où il se trouve figé dans un état hors d'équilibre, l'état vitreux. L'évolution de ses propriétés au cours du refroidissement caractérise alors ce que les physiciens nomment son « vieillissement physique ». Celui-ci met en jeu des mécanismes reliés étroitement à la relaxation moléculaire qui dépendent de la température et sont encore très mal connus.

Si on déstabilise par chauffage le verre à une température légèrement supérieure à Tg, le verre redevient un liquide surfondu et tend à revenir à son état d'équilibre. Mais quand l'excursion en température est plus élevée, on dépasse la simple réponse linéaire et des mécanismes de relaxation non linéaires entrent en jeu.

Une expérience originale pour sonder des phénomènes jusque-là inexplorés

Des chercheurs de l'Iramis sont parvenus à réaliser une expérience permettant de sonder ces phénomènes, jusque-là très peu explorés. Pour cela, ils appliquent à un liquide surfondu, porté à une température T0 légèrement supérieure à Tg, un choc thermique ultra-rapide (~ 60 000 K/s) et de grande amplitude (ΔT = +45 K en moins d'une milliseconde) par effet Joule puis maintiennent la température obtenue pendant une durée variable (entre 1 et 4 ms). Le liquide surfondu revient rapidement à sa température initiale, par trempe, en moins d'une seconde. Une simple mesure diélectrique permet alors de suivre la dynamique de retour à l'équilibre à la température T0.

Celle-ci s'avère dépendre de la durée du maintien à T0 + ΔT et il est possible d'extraire des mesures le temps caractéristique de mise à l'équilibre du système à la température T0 + ΔT. Ce temps, obtenu après l'impulsion thermique initiale rapide et de grande amplitude, est 230 fois plus long que le temps caractéristique mesuré en réponse linéaire à T0 + ΔT. C'est la signature de mécanismes non linéaires complexes qu'il est désormais possible d'étudier.

Les physiciens peuvent ainsi tester les limites des modèles actuels de vieillissement physique des verres lorsque ceux-ci se trouvent très loin de leur état d'équilibre thermodynamique, c'est-à-dire dans une situation où les théories sont encore dépourvues de principes fondamentaux permettant de faire des prédictions générales. Ils espèrent notamment tester une prédiction numérique très récente sur les nouvelles propriétés mécaniques qui pourraient survenir dans les verres trempés.

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