Les tauopathies sont des maladies neurodégénératives caractérisées par des inclusions intra-neuronales, dans lesquelles la protéine Tau se retrouve agrégée sous forme de fibrilles.
On dénombre actuellement une vingtaine de tauopathies parmi lesquelles la maladie d'Alzheimer (MA), la maladie de Pick (PiD), la maladie cortico-basale (CBD) ou encore la démence fronto-temporale (DFT), qui présentent un tableau clinique très hétérogène.
La propagation de neurone à neurone de ces agrégats pathogéniques de Tau et leur amplification au sein de neurones indemnes contribuent à l'évolution de ces maladies. Une étape clé est franchie dès lors que ces agrégats neuronaux se fixent aux membranes de cellules indemnes et les franchissent.
L'examen histologique de ces inclusions a révélé qu'elles prennent des formes différentes en fonction de la population neuronale affectée et des formes de Tau qui y sont exprimées (3R ou 4R, ces formes différant selon le nombre de domaines de liaisons aux microtubules) – autant de caractéristiques qui définissent le type de tauopathie impliquée.
Ces dernières années, la cryo-microscopie électronique a permis de caractériser à l'échelle atomique le cœur des assemblages fibrillaires (agrégats) de Tau présents dans les inclusions pathologiques. Cependant, elle ne permet ni d'obtenir une image complète de leurs structures, ni de caractériser la surface des assemblages, points de contact avec de nombreux composants cellulaires environnants.
Pour en savoir plus, les chercheurs de MIRCen ont étudié les mécanismes sous-tendant la propagation et l'amplification des agrégats pathogéniques de Tau en caractérisant l'« interactome » membranaire de ces agrégats, c'est-à-dire l'ensemble de leurs interactions moléculaires avec les protéines membranaires.
Ils ont ainsi établi des « cartographies » biochimiques des agrégats des formes 3R (agrégats Tau 3R) et 4R (agrégats Tau 4R) de Tau, pour différentes tauopathies. Ils ont en particulier identifié les séquences d'acides aminés exposées à la surface des agrégats et celles qui sont enfouies dans l'échafaudage fibrillaire de Tau.
Leur technique expérimentale s'appuie sur l'utilisation de « ciseaux » moléculaires (des protéases) et de « colorants » moléculaires. Ces derniers réagissent avec les acides aminés exposés à la surface des agrégats en les marquant de manière irréversible. Les produits de ces réactions sont ensuite identifiés par spectrométrie de masse.
Ce travail révèle des codes de reconnaissance moléculaires distincts pour les deux formes d'agrégats de Tau. En particulier, deux séquences d'acides aminés exposées dans les agrégats 4R sont absents des agrégats 3R, ce qui ouvre une nouvelle possibilité de distinguer ces deux formes et de cibler spécifiquement l'une ou l'autre pour développer un traitement.
Ce travail a été soutenu par l'ANR, le programme européen Neurodegenerative Disease Research et la Fondation Vaincre Alzheimer.