L'eau liquide en dessous de 0°C présente plusieurs anomalies qui semblent indiquer l'existence d'un point critique à basse température (PCBT) à la frontière entre deux phases liquides de densités très différentes (0,94 et 1,17). La mise en évidence de ce point critique est un véritable défi parce qu'il est impossible d'observer expérimentalement un volume d'eau liquide entre 150 K et 235 K.
Des chercheurs de l'Iramis ont eu l'idée d'observer des molécules d'eau confinées dans des pores nanométriques (diamètre 3,5 nm) afin d'abaisser sa température de fusion. Ils ont ainsi étudié un film d'eau d'épaisseur moléculaire, en contact avec la surface d'un verre de silice, et ils l'ont observé entre 160 K et 250 K avec plusieurs techniques : calorimétrie, diffusion de neutrons, RMN, spectroscopie infra-rouge. À 160 K, des « domaines » de haute densité commencent juste à se former sur la glace amorphe présente à plus basse température. Ils sont composés de molécules parvenant à engager quatre liaisons hydrogène avec leurs voisines dans le plan. Ils grossissent et se rejoignent pour « percoler » sur la surface à 200 K et la recouvrir totalement à 250 K.
La mise en évidence de ces transitions (nucléation de domaines de haute densité à 160 K et seuil de percolation à 220 K) est cohérente avec le diagramme de phases proposé dans le cadre théorique du PCBT. Le comportement thermodynamique de l'eau « bidimensionnelle » apparaît donc riche et complexe et son exploration est encore loin d'être achevée.