Le fœtus est un petit être aquatique. Car la circulation sanguine du fœtus, reliée au placenta de sa mère, ne passe pas par ses poumons. Pour cela, il dispose d’un canal entre le tronc pulmonaire et l'aorte pour permettre au sang d'éviter la circulation pulmonaire. Lors de sa naissance, un bébé subit un grand choc, celui de sa première respiration. Ce passage de la vie aquatique à la vie aérienne implique un changement physiologique ténu, mais capital : le canal artériel se referme rapidement et de façon irréversible. Certains enfants, en particulier les grands prématurés présentent un défaut de fermeture de ce canal (fréquence de 50 % pour ceux nés à 6 mois). Cette pathologie, nommée persistance du canal artériel (PCA), peut entraîner, entre autres, un souffle voire une insuffisance cardiaque et des retards de croissance. La PCA est alors traitée médicalement et/ou chirurgicalement.
Une équipe du CEA-IRTSV, en collaboration avec le CHU de Grenoble, a découvert le rôle majeur de deux protéines dans la fermeture du canal artériel. D’autres études avaient déjà révélé l’importance de ces protéines, appelées BMP9 et BMP10, dans la signalisation cellulaire liée aux systèmes sanguins et lymphatiques1. « Des souris dont le gène (et donc la protéine correspondante) BMP9 est déficient présentent une fermeture anormale du canal artériel, explique Sabine Bailly, chercheuse au CEA-IRTSV. En outre, le blocage de BMP10 chez les souriceaux obtenu par l’addition d’un anticorps anti-BMP10 empêche le remodelage de ce canal et entraîne la réouverture du canal artériel. » Les chercheurs ont réussi à montrer qu’une étape de transformation cellulaire nécessaire à ce remodelage implique BMP9 et BMP10. Aussi, ils sont parvenus à identifier chez deux patients présentant une PCA des anomalies dans une région du génome humain comprenant 8 gènes, dont celui codant pour BMP10. Suite à ces résultats, de nouvelles perspectives thérapeutiques pour traiter les enfants atteints de cette pathologie pourraient voir le jour.
Tronc aortique de souriceaux de 5 jours après injection de bleu Evans dans le cœur. Souriceaux Bmp9-/- injectés à jour 1 et 3 après la naissance avec IgG (A) ou un anticorps neutralisant dirigé contre BMP10 (B). Echelle (500 µm). © CEA