Chacun d’entre nous héberge cent mille milliards de micro-organismes dans son
tube digestif. Une communauté microbienne, ou microbiote, extrêmement diverse
comprenant des bactéries, des archéobactéries, des virus, des phages1, etc. Une
méthode d’exploration possible consiste à séquencer globalement l’ADN de tout ce
petit monde. Reste ensuite à attribuer les séquences trouvées dans ce
métagénome, en les comparant à des gènes de référence répertoriés. Problème : la
plupart des micro-organismes intestinaux, non cultivables en laboratoire, ne
figurent pas dans les catalogues. De plus, la complexité de ce milieu limite
l’utilisation des méthodes bioinformatiques classiques.
Un consortium international piloté par l’Inra, et impliquant des équipes du
CEA-IG (Genoscope)2, a utilisé la logique pour réduire l’ampleur du problème.
D’une part, tous les gènes d’une même entité biologique (le chromosome d’une
espèce bactérienne par exemple) sont présents à la même abondance dans un
métagénome donné. Cette abondance reflète tout simplement l’effectif de cette
entité dans le milieu analysé. D’autre part la composition de la population
intestinale est spécifique de chaque personne, la proportion des différents
organismes variant fortement d’un individu à l’autre. Si, en comparant le
contenu des métagénomes de différents sujets, on repère des ensembles de gènes
dont l’abondance varie de manière similaire d’un microbiote à l’autre, alors ces
gènes appartiennent probablement à la même entité.
Analysant ainsi les selles de près de quatre cents individus, les
scientifiques ont réparti les quelque 3,9 millions de gènes découverts en plus
de 7 000 «groupes de co-abondance». Parmi ces derniers, ils ont repéré plus de
700 espèces de bactéries, dont 630 inconnues, et reconstitué le génome de
référence de 238 nouvelles espèces. Plusieurs centaines de phages (plus de 800
inconnus) ont également été identifiés. De plus, en révélant des centaines de
relations de co-dépendance, les chercheurs ont projeté un éclairage nouveau tant
sur les mécanismes de survie de chaque microorganisme que sur le fonctionnement
global des populations.
- Virus infectant les bactéries
- Équipes mixtes CEA/CNRS/Université d’Evry