Notre planète est entourée d’un champ magnétique terrestre, engendré par les mouvements du noyau et nous protégeant notamment des vents solaires et des rayonnements cosmiques. Il subit toutefois des variations permanentes, provenant de multiples sources : mouvements au cœur de la Terre – responsables de l’évolution à long terme du champ magnétique, voire de l’inversion des pôles –, interactions avec les vents solaires, marées, activité humaine… Or, l’instabilité causée par le vent solaire, en cas de tempête magnétique, peut entraîner des perturbations sur les réseaux de transport d’énergie, les systèmes de positionnement, ou encore une exposition accrue des satellites aux particules ionisantes.
L’analyse du champ magnétique terrestre répond donc à des enjeux de premier ordre, dans de nombreux secteurs.
« Cette étude revêt avant tout un intérêt scientifique majeur », insiste Jean-Michel Léger, responsable du programme « Applications spatiales » au CEA. « Il s’agit de mieux comprendre notre planète et son évolution, au travers de son champ magnétique, d’utiliser les mesures pour faire de la navigation magnétique, ou de déduire des informations surla température et la salinité des océans. »
De la mission Swarm à NanoMagSat
Aujourd’hui, ce champ est étudié à l’aide d’observatoires magnétiques présents sur Terre, de magnétomètres embarqués dans des avions de ligne, mais aussi d’une mission spatiale de l’Agence spatiale européenne (ESA) : Swarm. Lancée en 2013, celle-ci se compose de trois minisatellites, possédant chacun des magnétomètres, déjà développés par le CEA-Leti.
« Nous nous sommes appuyés sur les premiers retours d’expérience de Swarm pour identifier une voie permettant d’approfondir l’analyse », indique Jean-Michel Léger. « C’est ce qui nous a conduits à proposer une nouvelle mission. »
Le projet NanoMagSat a été porté, dès 2014, par le CEA-Leti et l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP), avec le soutien du Centre national d'études spatiales (CNES). En 2019, le consortium a répondu avec succès à un appel d’offres de l’ESA, pour un programme d’une durée de trois ans, doté d’un budget de trente millions d’euros.
Une constellation de trois nanosatellites en orbite basse
La mission NanoMagSat est constituée de trois satellites « Cubesat 16U », c’est-à-dire des nanosatellites pesant 25 kg, contre environ 350 kg pour chaque satellite de Swarm. La moitié du volume d’un nanosatellite sera occupé par un mât déployable, ce qui laisse peu de place à l’instrumentation.
« Les équipes du CEA-Leti ont œuvré à la miniaturisation des magnétomètres, afin de les adapter à ces conditions », annonce Jean-Michel Léger. « Les instruments embarqués prolongeront donc les mesures réalisées dans le cadre de Swarm, mais permettront aussi de récolter des informations relatives à la météorologie spatiale. »
Les magnétomètres ont également été améliorés, tant du point de vue de leur résolution que de la fréquence d’acquisition des données. Ils seront accompagnés de caméras stellaires et d’un banc optique au sein de la charge utile, gérée entièrement par le CEA-Leti.
« Au-delà de l’optimisation des instruments, c’est aussi la configuration de la constellation qui a été optimisée », ajoute Jean-Michel Léger. « Contrairement à ceux de Swarm, deux satellites seront ainsi positionnés en orbite basse, à une inclinaison de 60°, ce qui permet d’améliorer la couverture spatio-temporelle, en revisitant plus rapidement les zones géographiques à différentes heures locales. »
En 2022, l’ESA a demandé au consortium de NanoMagSat de mener une étude de levée des risques, en particulier autour du mât déployable. Cette phase ayant été concluante, l’agence a validé la poursuite du projet, donnant ainsi le coup d’envoi effectif de la mission. Une bonne nouvelle pour les équipes impliquées, déjà tournées vers l’échéance finale : les lancements des satellites sont prévus dès la fin 2027.