Pour comprendre la matière à l'échelle nanométrique, il est nécessaire de pouvoir l'observer et la manipuler. Les microscopies en champ proche (à effet tunnel et à force atomique) sont deux des outils qui permettent d'observer la matière à l'échelle atomique et, sous certaines conditions, de la déplacer, atome par atome. Ces outils, associés à des logiciels de modélisation et de calcul, sont incontournables pour l'exploration de la matière. Sans eux, il ne serait pas possible d'étudier précisément son agencement et les propriétés inédites qu'elle présente, propriétés qui conduisent à de nombreuses applications nouvelles.
Le mouvement d'une particule de taille nanométrique est très différent du mouvement d'une particule de grosse taille. A l'échelle nanométrique, intervient le phénomène d'agitation thermique qui joue un rôle important, et parfois même prépondérant, dans le positionnement des particules. L'agitation thermique correspond au fait qu'à cette échelle, toute particule est en mouvement incessant. Cette agitation est liée à la température: plus un objet est chaud, plus les particules qui le composent sont agitées. Dans un cristal, les atomes, liés les uns aux autres, sont ainsi en vibration constante, la fréquence et l'amplitude de la vibration déterminant des caractéristiques importantes comme la conductivité électrique ou l'absorption de la lumière. Dans un gaz, chaque particule se déplace en permanence : il en résulte des collisions incessantes entre les particules et un mouvement d'ensemble complexe à prévoir.
Les assemblages d'atomes à l'échelle nanométrique font ainsi apparaître des propriétés nouvelles et inattendues, très souvent totalement différentes de celles des mêmes atomes assemblés dans des matériaux à l'échelle macroscopique, notamment pour la résistance mécanique, la réactivité chimique, la conductivité électrique, la conductibilité thermique, la fluorescence,… La maitrise de l'échelle nanométrique va donc conduire à l'élaboration de matériaux, dont les propriétés fondamentales (chimiques, mécaniques, optiques, biologiques, etc.) peuvent être modifiées d'une manière importante. Par exemple, l'or qui est chimiquement inactif à l'échelle macroscopique, devient réactif chimiquement, lorsqu'il se présente sous forme de particules de quelques nanomètres. Toutes les familles de matériaux sont ainsi concernées : les métaux, les oxydes métalliques et les céramiques, les polymères, les matériaux carbonés, etc... Ces matériaux originaux par leur structuration et leurs propriétés sont désignés sous le nom de nanomatériaux.
Du fait de leurs propriétés variées et souvent inédites, les nanomatériaux recèlent de potentialités d'applications très diverses et leurs utilisations ouvrent donc de multiples perspectives. Les nanomatériaux permettent à la fois des innovations incrémentales et des innovations de rupture dans de nombreux secteurs d'activité, tels que la santé, l'énergie, les transports, le bâtiment et les travaux publics, l'agroalimentaire, l'électronique, ou encore l'environnement. Les innovations techniques grâce aux nanotechnologies reposent largement sur l'amélioration des propriétés des matériaux. Elles concernent donc tous les secteurs industriels, des plus sophistiqués (électronique, santé, espace) aux plus traditionnels (construction, mécanique).
Nos sociétés sont de plus en plus dépendantes de nombreuses matières premières, comme les métaux précieux (platine, or, palladium, rhodium,..), les terres rares, mais également d'éléments comme le lithium, le tungstène, le cobalt, le titane, le cuivre, l'étain, l'antimoine, le germanium,…, aussi bien pour l'industrie minérale et les matériaux de constructions, que pour les industries de hautes technologies. Des matériaux avancés, le plus souvent multifonctionnels, structurés à l'échelle nanométrique commencent à se substituer à ces matériaux traditionnels dans les systèmes et les technologies qui nous entourent. Ils vont ainsi contribuer à l'indépendance de nos Sociétés vis à vis de ressources de plus en plus rares, en utilisant des produits innovants et des technologies plus performantes, dont l'impact sur l'environnement sera réduit. La maitrise du cycle de vie des matériaux et produits participera à cette économie des ressources, suivant le principe des 4 Rs : Réduire, Réutiliser, Recycler, Remplacer, en contribuant ainsi au développement d'une économie circulaire.
Les développements des nanomatériaux visent de nombreux objectifs: l'amélioration des performances, la réduction des pollutions, les économies d'énergie, les économies et la préservation des ressources naturelles.
La structuration des matériaux à l'échelle nanométrique, et les propriétés nouvelles qui en découlent, permet de concilier des propriétés jusqu'ici impossibles à obtenir simultanément dans un même matériau, comme par exemple la flexibilité et la résistance. Des propriétés particulières peuvent être apportées à des surfaces, comme les revêtements qui sont utilisés dans l'industrie mécanique pour les rendre plus dures, plus résistantes à la corrosion et pour diminuer le frottement des pièces mécaniques. Les outils de coupe et d'usinage sont ainsi particulièrement concernés avec des revêtements de nanomatériaux à base de nitrure de titane qui permettent d'augmenter de manière importante la vitesse de coupe et la durée de vie des outils destinés à l'usinage de superalliages aéronautiques. Dans un autre domaine, des nanoparticules déposées sur des supports solides vont permettre d'augmenter la vitesse de réactions chimiques, et de les rendre plus sélectives, contribuant à améliorer les rendements réactionnels et à favoriser ainsi des économies sur les ressources énergétiques et sur les matières premières, tout en diminuant la production de déchets.