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GRAND ANGLE
CEAbio
- n° 05 - juillet 2015
d’imaginer quel sera l’impact du réchauffement
climatique, il y en aura un à coup sûr !
»
Les familles de gènes présentes dans un
échantillon suggèrent le fonctionnement glo-
bal de la communauté. Première constatation:
près de la moitié des familles génétiques
ubiquitaires (présentes dans la majorité des
échantillons) ont une fonction inconnue ! Pour
le reste, une forte représentation de gènes
impliqués dans les mécanismes de transport
intracellulaire et de production d’énergie, y
compris par photosynthèse, a été constatée.
Enfin, bien que les organismes présents soient
très différents d’un échantillon à l’autre, les
grandes familles génétiques restent peu ou
prou les mêmes. Autrement dit, des commu-
nautés formées d’espèces différentes assurent
globalement les mêmes fonctions. Il en est de
même dans l’intestin humain : les microbiotes
de deux individus ne comportent pas forcé-
ment les mêmes espèces mais remplissent les
mêmes tâches. Ce pourrait être une propriété
générale des communautés microbiennes.
Aussi impressionnants soient-ils, tous ces
premiers résultats montrent surtout l’ampleur
de ce qui reste à découvrir dans les échantil-
lons rapportés par Tara. L’analyse du méta-
génome des eucaryotes, encore en cours de
séquençage, constituera en particulier un
des grands thèmes de recherche à venir du
Genoscope. Le séquençage des ARN, lui aussi
à venir, donnera une idée non pas des gènes
présents mais de ceux qui sont exprimés, donc
une image plus précise de l’activité réelle des
communautés.
1
Le ribosome est un organite intracellulaire
responsable de la traduction finale des
gènes en protéines. Composé d’ARN et de
protéines, il est lui-même codé par des gènes
particuliers.
Pour les communautés
planctoniques, composées d’espèces
pour la plupart inconnues et non
cultivables, il a fallu utiliser des
stratégies déjà développées en
particulier pour le microbiote.
La première approche, massive,
consiste à séquencer intégralement
l’ADN contenu dans l’échantillon
pour repérer tous les gènes
présents dans l’écosystème.
Ce «métagénome»,
via
les familles
de gènes présentes, renseigne
sur le métabolisme global de
la communauté.
Une autre approche consiste à
analyser un seul type de gène
présent chez toutes les cellules, en
l’occurrence un ADN ribosomal
1
.
On en tire des renseignements
taxonomiques : combien d’espèces,
ou plus précisément d’«unités
taxonomiques opérationnelles»
(OTU), différentes sont présentes
dans l’échantillon. La nature exacte
de ces OTU oscille entre le genre et
l’espèce.
Pour les virus, dépourvus de
ribosomes, il a fallu analyser les
gènes de protéines de capside afin
d’identifier des «protein clusters»,
équivalents viraux des OTU.
À chaque
échantillon
biologique son
type d’analyse
Appareil de fragmentation de
la molécule d’ADN par ultra-sons
au Genoscope.
© P.Latron / LookatSciences-CEA
Robot pour la préparation des échantillons
d’ADN avant séquençage (PCR quantitative)
installé au Genoscope.
© P.Latron / LookatSciences-CEA
1
Patterns and ecological drivers of ocean
viral communities; Brum, Ignacio-Espinosa,
Roux et al.
Le troisième article
1
descriptif est
consacré aux virus. Ici, pas de
ribosome mais des
protein clusters
(voir encadré ci-contre) qui ont
permis d’estimer le nombre total
d’ « espèces » à environ un million,
pour la plupart inconnues car non
cultivables. Les chercheurs ont
pu constituer la première base de
données quantitative globale sur les
communautés virales océaniques.
Les virus
marins revus
à la hausse