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Les couleurs de la Terre

Publié le 9 mars 2022

Les planètes se sont formées il y a 4,6 milliards d’années et la luminosité du Soleil était d’environ 30 % inférieure à l’actuelle. La Terre telle qu’on la connaît aujourd’hui, vue de la Lune, est bleue, verte, brune avec des touches de blanc. Pourtant, elle n’a pas toujours eu la même apparence : ses couleurs sont apparues progressivement, en plusieurs étapes.


L’évolution des couleurs de la Terre 

La principale source d’énergie sur Terre est le Soleil et sa luminosité évolue ; elle augmente de 7 % par milliard d’années. 

La Terre bleue

L’Hadéen est la période se situant entre 4,6 et 4 milliards d’années avant aujourd’hui
C’est pendant cette période que le bleu se distingue sur Terre avec l’apparition des océans quelques centaines de millions d’années après la formation de la planète Terre. Il est probable que le « bombardement primitif », c’est-à-dire une pluie incessante d’objets célestes, ait apporté l’eau sur Terre. Avant de devenir bleue, la Terre était seulement constituée de roches. Suite à cette pluie « céleste », la Terre serait devenue une quasi aquaplanète, mais elle abritait des îlots volcaniques. Il n’y avait pas encore de continents.

La lumière du Soleil, qui est blanche, contient toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Lorsqu’elle touche l’océan, une partie de la lumière est réfléchie et l'autre est réfractée et pénètre dans l'eau. Les premières couleurs à être absorbées par l’eau sont le rouge et l’orange, vient ensuite le vert. Il reste le bleu, qui devient visible.

Peu de données sont disponibles sur cette période. Cependant, ces dernières montrent qu’il faisait chaud sur Terre. Le cycle de l’eau se met en place rapidement avec l’évaporation de l’eau, donnant naissance aux nuages et aux précipitations. 

VidéoLe cycle de l'eau


Sans atmosphère, si la Terre était un caillou comme Mercure, elle aurait dû devenir blanche et traverser un épisode de glaciation pendant cette période car la luminosité du Soleil était beaucoup moins puissante qu’aujourd’hui (environ 30 % de moins). 

Il n’en est rien : en effet, les gaz à effet de serre, en particulier le dioxyde de carbone (CO2), étaient massivement présents dans l’atmosphère (le méthane, le dioxyde de carbone rejeté par les volcans des îlots et l’eau) et réchauffaient l’atmosphère et la surface de la planète. 


VidéoQu'est-ce que l'effet de serre ?


Même si la vapeur d’eau est largement présente dans l’atmosphère, le CO2 joue un rôle important.  Quant à la présence de méthane, elle est due aux archées méthanogènes : ce sont des bactéries qui fabriquent du méthane.

A partir de l’émergence des archées, autour de 3,5 milliards d’années environ avant aujourd’hui, on entre dans l’ère archéenne (l’Archéen).

On retrouve aujourd’hui ces bactéries dans les milieux très humides (marécages, rizières…) et dans les intestins des animaux (les ruminants par exemple). Elles peuvent vivre entre 0 et 110°C.


L’ocre et l’orange s’invitent sur Terre

Les continents, tels qu’on les connaît aujourd’hui, apparaissent il y a environ 3,2 milliards d’années et la Terre se refroidit de 3,2 à 2,9 milliards d’années. Quelques régions subissent une glaciation. La planète devient orangée avec des touches de blanc. On entre dans la seconde partie de l’Archéen.

Un changement très important de l’albédo terrestre est constaté avec l’émergence des masses continentales. Il est dû au caractère réfléchissant des roches qui réfléchissent l’énergie solaire. Cet effet a pour conséquence de rafraîchir la planète. En effet, la chaleur étant réfléchie, elle n’est pas absorbée par la surface terrestre. Par exemple, c’est comparable au fait que quand il fait chaud, il est conseillé de s’habiller en couleurs claires car le noir absorbe la chaleur. 


VidéoQu'est-ce que l'effet d'albédo ?


L’équilibre atmosphérique du CO2 est lié aux puits et aux sources de carbone. Ces derniers permettent de réguler et de stabiliser le niveau de CO2 dans l’atmosphère.

Source et puits de carbone

La source produit du gaz dans l’atmosphère et le puits en ôte pour le stocker ailleurs. Par exemple, avec le dioxyde de carbone : aujourd’hui, les activités humaines sont responsables du surplus de CO2 dans l’atmosphère. Elles sont la « source ». La biosphère, quant à elle, stocke le carbone sous forme de végétaux continentaux ou marins (arbres ou algues, mais aussi dans les sols). Elle retire transitoirement du CO2 pour le transférer dans le réservoir continental ou le réservoir marin : c’est ce qu’on appelle un puits de carbone.

L’érosion des roches continentales silicatées provoque une baisse du CO2 qui passe de l’atmosphère aux océans à travers le réseau des rivières. Cette érosion est due au CO2 qui se joint aux gouttes d’eau des précipitations, et par une série de réactions chimiques complexes qui emportent le CO2 atmosphérique ainsi piégé au fond des océans.

La concentration en CO2 dans l’atmosphère s’effondre car le rapport CO2/méthane se déséquilibre lors de l’apparition des continents, atténuant l’effet de serre et le réchauffement climatique. Le taux de méthane serait resté stable et aurait réagi avec l’énergie solaire dans la haute atmosphère pour former des aérosols

Ce déséquilibre entraîne la formation de brouillard avec une baisse des températures. L’atmosphère terrestre prend alors une couleur orangée, semblable à celle de Titan (satellite de Saturne où il existe de tels aérosols liés au méthane).

Cette couleur orangée, instable, a pu s’inviter sur Terre jusqu’à il y a 2,9 milliards d’années où a lieu la glaciation pongolienne, la première glaciation régionale connue.

Le brouillard finit par se dissiper car le taux en CO2 remonte avec l’érosion, et les archées méthanogènes produisent moins de méthane. La Terre se réchauffe et l’épisode glaciaire se termine.


Le blanc recouvre la Terre

Malgré le réchauffement de la Terre par la luminosité du Soleil qui s’intensifie de 7 % environ par milliard d’années, deux accidents majeurs ont eu lieu : la Terre s’est sans doute entièrement recouverte de blanc lors de deux événements rapprochés. 

L’apparition de l’oxygène crée une véritable révolution, entre l’Archéen et le Protérozoïque (entre 2,45 et 2,2 milliards d’années), on la nomme le Grand Événement d’Oxydation (GEO)

L’origine de l’oxygène sur Terre se trouverait dans l’eau. 

Les quelques molécules d’eau issues de la vapeur d’eau qui parviennent à atteindre la stratosphère sont cassées par le rayonnement ultraviolet du Soleil. 

L’hydrogène est léger, il s’échappe. Il reste donc l’oxygène, plus lourd, qui retombe à la surface du sol et qui participe à l’oxydation de la croûte terrestre. En effet, celle-ci s’oxyde lentement, l’oxygène réagit avec la croûte terrestre pendant des centaines de millions d’années. In fine, lorsque la croûte est oxydée, l’oxygène percole dans l’océan et l’atmosphère pendant le GEO. L’écosystème se voit bouleversé : en effet, l’oxygène étant un poison pour les archées méthanogènes, celles-ci se réfugient dans les zones où il n’y a pas d’oxygène, elles se réduisent en nombre en laissant place à de nouvelles formes de vies, comme les cyanobactéries. Celles-ci développent la photosynthèse. Elles fabriquent, à partir de l’eau et de la lumière, l’hydrogène dont elles ont besoin et rejettent l’oxygène. 

VidéoLes Cyanobactéries : des origines de la vie à la conquête de l'espace


La baisse de quantité de méthane, qui permettait de maintenir la chaleur sur Terre avec son effet de serre, a pour conséquence la chute des températures, ce qui entraîne la glaciation huronienne (2,4 milliards d’années).

Ensuite, de la fin de l’Archéen au Néoprotérozoïque (2,3 milliards d’années à 800 millions d’années), c’est le dioxyde de carbone qui permet de réguler la chaleur de la Terre, couplée à l’énergie solaire qui devient de plus en plus vive (qui passe de 85 % à 94 % de sa valeur actuelle). 

VidéoLumière vitale

Cependant, la Terre redevient « une boule de glace » pendant deux épisodes, appelés « snowball earth », proches à l’échelle géologique : d’abord entre 717 et 660 millions d’années et ensuite aux alentours de 645 et 635 millions d’années. Pour ces dernières glaciations, les chercheurs disposent de reconstructions de la distribution continent-océan, ce qui leur a permis de montrer que c’est l’éclatement du supercontinent Rodinia en petites plaques qui sont restées dans la zone tropicale qui a favorisé une augmentation considérable de l’érosion silicatée et donc une très forte baisse du CO2 jusqu’à l’englacement.

Snowball Earth
Une impression d'artiste de la "Snowball Earth" © Nasa


Enfin, la Terre a pu se déglacer grâce au volcanisme qui aurait continué à émettre du CO2 qui se serait stocké dans l’atmosphère durant les périodes de glaciation. C’est ce qu’affirme l’hypothèse émise par Joseph Kirschvink, un géologue américain. Ce processus rendrait une Terre « boule de neige » instable puisque le CO2 accumulé dans l’atmosphère par le volcanisme finirait par la déglacer. 


Une apparition tardive de la couleur verte sur les continents

Pendant le dévonien (419-358 Ma) les surfaces continentales vont devenir « vivantes », des plantes, des fougères, des forêts vont s’y développer et hisser la dernière couleur : le vert, alors que jusqu’à présent seul l’océan hébergeait la vie.  

Les continents se partagent à présent plusieurs couleurs : le bleu, le brun, l’ocre (avec la présence des déserts), et le vert il y a 370 millions d’années. 

Aujourd’hui, on observe toujours les mêmes couleurs avec le bleu dans les océans, le vert et le brun pour la plupart des continents et le blanc aux pôles. Notre planète possède deux calottes de glace, une dans chaque hémisphère, ce qui à l’échelle géologique est très rare. En effet, la Terre cumule les conditions propices à cette particularité exceptionnelle : elle possède deux terres au nord et au sud qui gardent une température froide toute l’année, quelles que soient les saisons, pour conserver l’eau sous forme solide.