La sûreté des installations nucléaires est définie comme l'ensemble des dispositions techniques prises aux stades de la conception, de la construction, puis de l'exploitation et enfin du démantèlement pour :
- assurer, en situation normale, un fonctionnement et un état des installations (incluant les transports associés, ainsi que la gestion des effluents et des déchets résultants) sans danger pour les travailleurs, les populations et l'environnement,
- prévenir les situations accidentelles et en limiter les effets.
La sûreté nucléaire implique la maîtrise d'un ensemble de dispositifs techniques :
- les réactions nucléaires et chimiques
- l'évacuation de l'énergie produite
- le confinement des produits dangereux
- le devenir des déchets et effluents.
Les facteurs organisationnels et humains sont également pris en compte.
La sûreté nucléaire constitue, avec la sécurité dont elle est une composante, la première priorité du CEA. L'affirmation de la priorité "sécurité-sûreté" est essentielle : elle exprime une stratégie fondamentale de l'entreprise, partagée par tous. Pour être opérationnelle, la priorité est traduite en termes de management et d'organisation, d'objectifs techniques et de méthodes techniques.
Les fondements de la sûreté nucléaire
Bâtir une succession de lignes de défense
Le risque zéro n'existe pas : il est en effet toujours intellectuellement possible de postuler une série de défaillances suffisamment longues pour parvenir à une situation accidentelle.
Les dispositions de sûreté consistent à interposer des "lignes de défense" successives et indépendantes qui s'opposent à tout scénario accidentel, en garantissant que la défaillance de toutes ces lignes est, non pas strictement impossible, mais très peu vraisemblable.
Afin d'en garantir la sûreté, les concepteurs d'une installation nucléaire postulent toujours l'échec successif des dispositions prises. Tout d'abord, ces dispositions doivent garantir le fonctionnement normal. En cas d'échec, aucune défaillance ne doit pouvoir entraîner une situation accidentelle. En cas de nouvel échec, d'autres dispositions doivent minimiser les effets. C'est la
défense "en profondeur".
L'expression "ligne de défense" doit être prise dans un sens très large : il s'agit de tout dispositif ou de toute disposition dont l'existence assure la sûreté : enceinte de confinement, mécanisme de contrôle d'une réaction, refroidissement de secours, intervention d'opérateur prévue par procédure, etc…
L'efficacité de chaque ligne de défense doit être évaluée vis-à-vis de tous les scénarios envisageables. C'est le cumul de leurs efficacités qui permet de justifier le caractère "très peu vraisemblable" des scénarios accidentels.
A la conception, mais aussi tout au long de la vie d'une installation, la bonne appréciation de l'efficacité des lignes de défense doit être démontrée dans les rapports de sûreté et leurs réévaluations périodiques :
- la protection doit être homogène vis-à-vis des différents scénarios
- la permanence de l'efficacité de chaque ligne de défense doit être assurée en toutes circonstances
- les lignes de défense doivent être "indépendantes" afin que la chute de l'une d'entre elles ne provoque pas "d'effet de dominos".
La résistance des installations nucléaires aux événements naturels extrêmes (séismes, inondations, neige, tempêtes…) est également prise en considération dès la conception d’une installation et est régulièrement réévaluée. Des marges de sûreté supplémentaires sont prises pour que les installations soient capables de résister au-delà de l’aléa climatique ou sismique maximum identifié.
Les évaluations complémentaires de sûreté
A la suite de l’accident de Fukushima Daiichi, survenu le 11 mars 2011 au Japon, les autorités de sûreté ont demandé aux exploitants nucléaires de mener des Évaluations complémentaires de sûreté (ECS) sur chacune de leurs installations afin d’analyser précisément les marges de sûreté dont chacune dispose, au-delà du dimensionnement initial retenu pour les phénomènes extrêmes.
Si de nombreuses dispositions sont d’ores et déjà prises pour éviter une perte des fonctions essentielles de sûreté (arrêt de la réaction nucléaire, maintien du refroidissement, maîtrise du confinement), les ECS ont également consisté à postuler une perte de l’alimentation électrique et des systèmes de refroidissement. Les situations susceptibles d’induire une brusque dégradation de la sûreté ont été identifiées et des dispositifs ultimes de sûreté ont été mis en œuvre. Les installations nucléaires pour lesquelles cela a été jugé nécessaire ont ainsi été dotées d’un « noyau dur » : en cas d’événement hors norme, ce noyau dur doit être capable de résister aux conditions extrêmes et d’assurer durablement les fonctions de sûreté vitales.
Les ECS ont également été menés sur les divers sites du CEA afin d’examiner les moyens alloués à la gestion de crise. Une Force d’Action Rapide Nucléaire (FARN), capable d’intervenir rapidement en appui des équipes du site sinistré, a été également mise en place.
En complément de la FARN, le dispositif de gestion de crise de chaque site du CEA peut être complété au besoin par des moyens matériels plus « lourds », projetables, mis en commun par les trois exploitants (EDF, ORANO, CEA): les M²IN, Moyens Mutualisés d’Intervention Nucléaire (M²IN).