Cap sur les batteries du futur !
Trois questions à Séverine Jouanneau, chef du Département de l’électricité et de l’hydrogène pour les transports (DEHT) du CEA-Liten.
Comment se positionne le CEA-Liten en support de la filière batteries ?
S. J. : Le CEA-Liten s’inscrit dans une dynamique impulsée en Europe pour soutenir la filière batteries, en jouant un rôle d’accompagnement en R&D pour les industriels sur toute la chaîne de valeur. Nous travaillons notamment sur l’amélioration des matériaux pour les électrodes, des procédés de fabrication, des électrolytes et des chimies, et jusqu’à la mise en œuvre des technologies développées et leur évaluation sur des prototypes de cellules. Côté matériaux, nous cherchons, par exemple, à améliorer les composants lamellaires des électrodes positives afin de réduire la quantité de cobalt, et donc leur impact environnemental. Dans tous les cas, il s’agit de caractériser finement les phénomènes qui se produisent aux interfaces afin de les optimiser, ce qui est crucial pour les performances.
Quels sont les résultats marquants de l’année 2020 ?
S. J. : En 2020, nous avons réussi à produire et à mettre en œuvre les premières électrodes par extrusion plutôt que par enduction ! Ce procédé permet de s’affranchir de l’utilisation de solvants toxiques et difficiles à retraiter. Nous avons été jusqu’à la réalisation de premières cellules et les tests de leurs performances laissent entrevoir des résultats à la hauteur des attentes. Côté matériaux, nous avons identifié plusieurs pistes de travail pour développer des électrolytes hybrides voire solides. Par rapport aux électrolytes liquides actuels, ils permettent de concevoir des cellules beaucoup plus compactes et plus sûres. Enfin, concernant les électrodes, nous avons amélioré les performances des matériaux existants et sélectionné ceux qui seront intégrés dans les premières batteries lithium-ion de 3e génération qui sortiront des usines françaises en 2023-2024.
Quels sont les défis à venir ?
S. J. : La 3e génération étant à peu près prête, nous allons concentrer nos efforts sur les suivantes. Pour la 4e génération, nous avons déjà identifié des électrolytes candidats : il faut maintenant sélectionner et mettre en œuvre celui ou ceux qui permettront d’atteindre les performances industrielles visées. Quelques verrous restent à lever, comme la maîtrise des interfaces au sein d’une batterie « tout solide », pour maintenir de bonnes conductions ionique et électronique. Pour les suivantes, nous travaillons, par exemple, sur des technologies en rupture comme la chimie lithium-soufre qui permettrait de passer encore un gap en termes de performances. Ces recherches, et les développements futurs, seront orientés par les impacts environnementaux du cycle de vie et du recyclage de ces produits. Et ce dès le choix des composants et des procédés, ou encore de la conception.
CEA-Liten : institut de la Direction de la recherche technologique dédié à la création de solutions en réponse aux enjeux climatiques, énergétiques et environnementaux.
Enduction : Traitement de surface qui consiste à appliquer un revêtement généralement liquide sur un support (papier, textile, film plastique, métal, etc.), suivi d'un séchage et éventuellement d'une réticulation (formation d’un ou plusieurs réseaux tridimensionnels par voie chimique ou physique).
3e génération : La 3e génération de batteries lithium-ion (et les suivantes) améliore les performances, notamment en termes de capacités de stockage d’énergie, des deux premières générations actuellement commercialisées.