La génomique environnementale est utilisée, depuis plusieurs années, pour accéder au contenu génomique global d'organismes provenant d'un environnement donné. L'exploitation à large échelle des données métagénomiques et métatranscriptomiques ainsi obtenues reste cependant essentiellement gène-centrée et ne permet pas d'appréhender la biologie des organismes et des communautés d'un environnement. Une telle approche rend également difficile l'identification de génomes complexes de grande taille, comme c'est le cas chez les espèces eucaryotes.
L'équipe Analyses Génomiques des Eucaryotes du Laboratoire de Génomique Métabolique (Genoscope) a récemment mis au point une méthode de croisement de données métagénomiques et métatranscriptomiques, permettant la reconstruction de transcriptomes eucaryotes. La démarche consiste à regrouper les transcrits de gènes présentant des profils similaires de variation d'abondance dans une collection d'échantillons. Les groupes ainsi obtenus, appelés MGT (pour Metagenomic-based Transcriptomes) peuvent alors conduire à l'identification d'organismes ou d'associations d'organismes.
Cette méthode a été appliquée à un ensemble de plus de 37 millions de gènes identifiés à partir de 365 échantillons provenant de l'expédition Tara Oceans. Les transcrits ont été regroupés en plusieurs centaines de MGT, dont certains correspondent à des organismes connus.
Les analyses ont notamment révélé le rôle, jusqu'ici ignoré, de plusieurs organismes eucaryotes, notamment du groupe des Chloropicon, dans le métabolisme du di-méthyl sulfono-propionate (DMSP), un composé majeur du cycle géochimique du soufre, impliqué dans les interactions océan – atmosphère – climat. D'autres MGT correspondent à des associations d'organismes, dont une symbiose entre une cyanobactérie fixatrice d'azote et une algue unicellulaire, pour laquelle il n'existait jusqu'à présent aucune donnée génomique.
Le regroupement de transcrits en MGT représente une ressource unique pour l'analyse des organismes et des communautés planctoniques eucaryotes de l'océan ouvert.
Cette approche pourrait donner accès aux contenus génétiques et aux fonctions biologiques de nombreuses espèces d'intérêt écologique, dont certaines ne sont pas encore décrites.
Pour en savoir plus sur le projet Tara Oceans